Une famille de demandeurs d’asile hébergée par un particulier : un coup de cœur, ça ne se commande pas

Berlin, Xhuliano, Jacques, Géraldine, Valter, Nexhadie, Angelo.

Jacques ne s’est pas posé de questions. Bourlingueur et engagé à divers titres, il a décidé d’héberger cette famille d’Albanais à la dernière rentrée scolaire.

« Le foyer Saint-Vincent m’a demandé si je pouvais accueillir une famille. J’ai répondu oui sans réserve. » Voilà comment parle Jacques, avec enthousiasme et sans détour. Ce qui compte pour lui, c’est l’action, pas les discours. Et puis, comme il vivait seul, il a fait d’une pierre deux coups.

En 2013, la famille a débarqué à Annemasse. Elle vivait à la rue, femme, mari et enfants.

En 2016, amputée du père à cause de déboires dans leur pays d’origine, Nexhadie et ses quatre enfants retrouvent la France après avoir  été expulsée. Cette fois,  ils sont accueillis par un couple et restent cinq mois chez ces hôtes.

Puis, un concours de circonstance – on va dire d’amitié – fait que le fils de Géraldine Tardy, Warren, fréquente la même école que Angelo, un des fils de Nexhadie. « Ils sont arrivés d’Albanie en octobre 2015 avec une situation difficile, raconte Géraldine. Ils ont été expulsés de Poisy parce qu’ils n’avaient pas de droits. » À l’époque, ils n’avaient pas été régularisés, car l’Albanie, n’était pas en guerre. Au bout de six mois passés dans là-bas, Nexhadie prend peur à cause des règlements de comptes.

Le 1er mai 2015, la maman et ses enfants reviennent en France avec leurs propres moyens, aidée par son frère, après un détour par le Kosovo et Genève. Imaginez débarquer dans un pays qu’on ne connaît pas, avec rien et quatre enfants. C’est le lot de centaines de migrants.

La famille traîne quelques mois d’hôtel en hôtel, payés par Géraldine. Saint-Vincent de Paul prend le realai, puis le couple Molinat.

 

Une famille qui se bat chaque jour

La solidarité joue. Hélène Brasset, de Saint Vincent de Paul, connaît Jacques : « Elle m’a donc proposé de les prendre, moi qui est seul et adore les enfants » Il s’enflamme. « Je suis un catholique pratiquant. Je voulais rendre service et je respecte tout le monde. J’ai quand même imposé une certaine discipline de vie à la maison. »

Nexhadie bénéficie d’aides du Secours catholique, de Saint Vincent de Paul et des Restos du Coeur. Elle prend des cours de français au collège Raoul Blanchard. Nexhadie a nettement progressé et est capable désormais de soutenir une conversation. Pour Géraldine, « c’est une famille attachante. Elle se bat. Car souvent, au fil des ans, les gens baissent les bras. Les enfants sont polis. Ils ont des valeurs et ils ont su se créer un réseau de solutions. »

Nexhadie a divorcé. La voilà seule, mais entourée, pour se battre et obtenir un permis de séjour. Le dossier est toujours en cours.

Pour Jacques, « la France est un pays qui, naturellement, doit accepter les réfugiés. » C’est pour cette raison qu’il l’a fait. « Si la famille retournait en Albanie, elle risquerait d’en subir les conséquences. »

Le fils aîné, Berlin, 16 ans, va passer son BAC Pro. A l’issue, il intégrera une école de gendarmerie à Dijon et aura la nationalité française en 2018. Angelo, 13 ans, étudie au collège de Poisy. Xhuliano, 10 ans, et Valter, 8 ans, intègrent l’école primaire de Vieugy.

 

Et l’accueil en France, qu’en pense la mère ?

« La culture est bonne et les enfants peuvent mener une vie normale. J’espère avoir mes papiers, du travail, et ainsi encore mieux m’occuper de mes enfants. »

Jacques croit à la jeunesse. « On est quand même rendu à la troisième génération qui n’a pas connu la guerre. Ce sont les enfants qui sont l’avenir. Sinon, pourquoi on vit ? »

Le dynamisme de Jacques, l’abnégation de la mère, et le soutien citoyen donnent le moral à la famille. « J’ai mes quatre enfants, ajoute avec émotion Nexhatie, et ils me permettent de rester droite et honnête. »

Leur hôte approuve. « Si je fais ça, à 66 ans, ce n’est pas pour moi, c’est pour eux. »

Géraldine rappelle au passage que ses parents sont venus en France pour fuit-r la dictature Mussolinienne.

Et Jacques de renchérir : « Ils resteront au moins une année scolaire. Mais je n’ai pas de délai. Seules sont perdues les batailles qu’on ne livre pas. »

Auteur: Loïc Quintin

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