Oeufs contaminés : le fipronil, un insecticide pas si toxique !

Des dizaines de millions d’œufs ont été retirés de la vente en Europe, après que des taux de fipronil supérieurs aux normes de l’UE aient été détectés. Cet insecticide, utilisé surtout contre les poux, est strictement interdit chez les animaux destinés à la consommation humaine, mais est très peu toxique.

Si les informations données se veulent rassurantes pour la santé humaine, on ne peut s’amender de dénoncer la production alimentaire industrielle imposée par les grands groupes de l’agro-alimentaires qui créent toutes les conditions de futurs scandales alimentaires.

 

Nous publions deux articles parus dans des médias nationaux :

 

Site « allodocteurs.fr » sur la 5

Par Arthur Laffargue, avec AFP

Rédigé le 8 août 2017 , mis à jour le 8 août 2017

Le scandale va sans doute entraîner la morts de millions de poule, abattues par leurs éleveurs à cause du fipronil détectés dans leurs oeufs. Aux Pays-Bas, en Allemagne, au Royaume-Uni et en France, les taux de fipronil dépassaient parfois largement les seuils autorisés par la réglementaiton européenne. « Treize lots d’oeufs contaminés en provenance des Pays-Bas » ont été livrés en juillet à des entreprises de transformation alimentaire situées dans l’ouest de la France, selon le ministère français de l’Agriculture. Mardi, les autorités sanitaires néerlandaises portaient également leur attention sur la viande de poulets, potentiellement contaminée.

Le fipronil est interdit sur les animaux consommés par l’homme, mais il ne présente pas réellement de danger, et cette molécule est même utilisée sur nos animaux domestiques.

Qu’est-ce que le fipronil ?

Le fipronil est utilisé dans les produits phytosanitaires en tant qu’insecticide. Il permet de lutter contre les « ravageurs des cultures, les puces des animaux familiers, les termites et les fourmis », selon le rapport rendu en 2005 par l’AFSSA (1) et l’AFSSE (2), destiné à évaluer les risques pour la santé humaine du fipronil. Il est utilisé depuis 1994 et se retrouve aussi bien dans des préparation utilisées par les agriculteurs ou les jardiniers et dans des médicaments vétérinaires.

Comment se retrouve-t-il dans les œufs et la viande ?

Le fipronil est soluble dans la graisse et peut donc se retrouver dans le lait si des vaches le consomment, dans les œufs des poules et bien évidemment dans la viande. C’est pourquoi il est interdit de l’utiliser sur les animaux destinés à la consommation humaine.

Il est toutefois courant de retrouver du fipronil dans la composition des colliers anti-puces pour chats et pour chiens. Une application autorisée et sans risque d’en ingurgiter en trop grande quantité, puisque ces objets se trouvent à un endroit où l’animal ne peut se lécher.

Le fipronil est-il toxique ?

« On n’a jamais vu de cas d’intoxication chez l’homme », affirme Jean-François Narbonne, professeur émerite en toxicologie alimentaire et l’un des auteurs du rapport de 2005 de l’AFSSA et de l’AFSSE. Chez le rat, bien plus sensible, l’exposition à long terme à une forte concentration de fipronil peut atteindre le foie, les reins et la tyrhoïde. Les abeilles sont aussi vulnérables, ce qui explique que l’usage de cet insecticide sur les semences de maïs est interdit dans l’Union européenne depuis 2013. La dose léthale chez l’homme est 100 fois supérieure à la nicotine, produit déjà peu dangereux et qui se classe, comme le fipronil, parmi les neurotoxiques.

« C’est la dose qui fait le poison, poursuit l’ancien professeur. Si les éleveurs avaient mis des grandes quantités de fipronil, ils auraient tué les poules. » Plutôt que l’homme, qui ne risque dans cette histoire que de consommer des traces de la molécule, sans que cela ne présente de danger. Les normes, les « limites maximales de résidus » (3), existent d’abord pour prévenir une ingestion à long terme, dans le lait notamment. « Cela pourrait entraîner un mal de tête, détaille Jean-François Narbonne. A forte dose on peut tomber dans le coma.’ Mais il faudrait respirer une solution concentrée, une hypothèse improbable. Le fipronil est bien moins problématique que d’autres types insecticides, comme le DTT ou les dérivés du pyrèthre.

Le danger pour la santé publique dans le cas des œufs contaminés est donc quasi-inexistant. Les autorités européennes et nationales doivent simplement corriger ce non-respect de la réglmentation pour éviter la généralisation de l’usage du fipronil.

(1) Agence française de sécurité sanitaire des aliments. A fusionné en 2010 avec l’AFSSET pour former l’ANSES, l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

(2) Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement (AFFSE) Ancêtre de l’AFFSET.

(3) Une « limite maximale de résidus » ou LMR est définie par le Codex Alimentarius comme la concentration maximale du résidu d’un pesticide (exprimée en mg/kg) autorisée officiellement dans/sur des produits alimentaires ou des aliments pour animaux


Article paru dans l’Express.
 

Après l’Europe, les oeufs contaminés par cette substance toxique touchent aussi la France. Elle n’est pourtant pas si dangereuse que ça, selon les experts.

Les pâtisseries, biscuits et autres plats à base d’oeufs vendus dans nos supermarchés contiennent-ils du « fipronil »? C’est la question qui agite l’Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale (Anses). Depuis les révélations du ministère de l’agriculture, lundi 7 août au soir, la France est à son tour touchée par le scandale des oeufs contaminés par cet insecticide. En juillet dernier, deux entreprises de transformation alimentaire ont reçu treize lots d’oeufs contaminés, importés des Pays-Bas. Pour le moment, aucun oeuf contaminé ne semble avoir été vendu directement aux consommateurs français. Mais des traces de l’insecticide fipronil pourraient se retrouver dans certains ovoproduits, ces aliments modifiés à base d’oeufs.

LIRE AUSSI >> Oeufs contaminés: tests, abattage, enquêtes… Tout savoir sur le scandale européen

Problème: le fipronil est « modérément toxique » pour l’homme, lorsqu’il l’ingère en « grande quantité », d’après l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Si cet antiparasite est interdit dans le traitement des animaux destinés à la consommation, il est autorisé dans les produits vétérinaires, pour éliminer les poux, les tiques et les acariens. Il aurait ainsi été utilisé de manière illégale sur des poules pondeuses.

Une substance peu toxique

Les risques de toxicité sur l’homme sont pourtant très faibles. « Le fipronil est connu pour avoir un faible taux de toxicité », affirme Emmanuel Puskarczyk, médecin toxicologue du Centre antipoison du CHU de Nancy. En général, lorsqu’il est ingurgité, le fipronil ne provoque que très peu d’effets sur l’homme.

Ce centre nancéien reçoit quotidiennement des appels de victimes d’accidents domestiques de ce type. Les incidents sont fréquents, puisque cet insecticide est présent dans des produits ménagers ou domestiques, notamment contre les nids de guêpes. Qu’ils aient ingurgité une faible ou une forte dose, la plupart de leurs patients « n’ont jamais eu des effets très fâcheux, y compris les enfants », rassure le toxicologue.

Les risques sont encore plus faibles lorsque le fipronil se retrouve dans un aliment. Sa teneur est beaucoup plus faible, puisque la substance est diluée avec le reste des ingrédients. « La concentration en fipronil est beaucoup plus faible dans une pâtisserie industrielle, que dans un oeuf en coquille », précise le toxicologue du Centre antipoison.

Des risques à partir de 10 oeufs

Les premiers risques potentiels apparaîtraient quand le fipronil est présent dans au moins 0.72 mg/kg d’un aliment, selon la limite imposée par la commission européenne. Au-delà, la substance peut provoquer « des vertiges, des nausées, des vomissements », énumère un spécialiste sur LCI, qui précise que les « cas mortels sont rarissimes, peut-être un cas en trente ans. »

Là encore, les spécialistes ne s’alarment pas. Les doses retrouvées sur les oeufs contaminés aux Pays-Bas sont beaucoup plus faibles que ce seuil: la teneur maximale retrouvée est de 0.096 mg/kg, selon les résultats de l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA). « Actuellement, il n’y a aucun danger pour la santé publique. Ce n’est pas le produit qui fait le poison, c’est sa dose », affirme Jean-Sébastien Walhin, porte-parole de l’AFSCA, contacté par L’Express.

Il faudrait ainsi manger au moins « une dizaine d’oeufs contaminés, en une seule fois, pour que ce soit potentiellement toxique », précise Emmanuel Puskarczyk du Centre antipoison, ce qui reste peu probable. Et même dans ce cas, il n’y a pas de quoi s’inquiéter: « Nous recevons des patients qui ont ingurgité des doses 10 fois supérieures, et ils n’ont rien », ajoute-t-il, en précisant que les consommateurs peuvent continuer de manger des ovoplats « sans préoccupation ».

Faibles conséquences à long terme

Les dangers à long terme sont également très rares. « Il faudrait ingurgiter des doses énormes, plus d’un gramme pendant des années, pour avoir des effets sur le cerveau », affirme le toxicologue.

Les risques de cancers sont donc actuellement écartés . Faute de preuves, le fipronil n’est pour le moment pas répertorié dans les substances cancérigènes pour l’homme. « Des tests ont montré qu’il peut être cancérigène chez certains animaux, mais cette étude n’est pas transposable à l’homme », souligne le toxicologue du CHU de Nancy.

Auteur: j.c

Partager cet article :

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.