Les nouveaux sophistes.
Dans l’Antiquité grecque on appelait« sophistes » ceux qui voulaient se faire passer pour des philosophes alors que, loin de s’adonner à la recherche de la meilleure façon de vivre ensemble par la réflexion, ils n’utilisaient le langage que pour tromper les autres et soutenir des intérêts personnels.
Nous avons nous aussi, aujourd’hui, nos sophistes. Ils ne s’appellent plus Gorgias ou Protagoras mais Henri-Lévy, Finkielkraut, Soral, Dieudonné ou Zemmour avec toute une kyrielle de suiveurs et des foules de partisans.
Ils sont tous très habiles et il est facile de se laisser prendre à leurs arguments qui ont l’apparence du bon sens et de la rationalité mais si on y regarde de plus près on découvre que ce qu’ils veulent défendre n’a rien à voir avec l’intérêt général, rien à voir avec la pensée philosophique et même rien à voir avec la raison.
En fait ce qui les anime est la peur et ce qu’ils expriment est la haine.
En fait leurs préoccupations sont communautaristes, ethniques, identitaires…
Les premiers (Henri-Lévy, Finkielkraut et leurs semblables) sont incapables de raisonner en laissant de côté leur attachement à Israèl, quelle que soit la politique du gouvernement en place dans le pays. Partout ils voient des antisémites et pour un peu ils traiteraient d’antisémites non pas ceux qui haïssent les juifs mais tous ceux qui ne sont pas d’accord avec eux. Bien entendu les Arabes et en particulier les musulmans sont, à leurs yeux, la cause de tous les maux et, bien sûr, du déclin de la civilisation occidentale.
Les seconds ( Soral, Dieudonné et compagnie) sont incapables de raisonner en laissant de côté leur haine d’Israèl et pour bien d’autres raison que la politique actuelle de son gouvernement. Ils nient ou minimisent la Shoah et détestent presque autant les musulmans que les juifs, considèrent les femmes comme des êtres inférieurs et prônent le culte de l’Homme, celui qui « en a ».
Quand à Zemmour, on pourrait le placer avec les uns ou avec les autres, c’est, comme dit Attali, un « juif antisémite » qui, à la fois, s’en prend à la « sacralisation de la Shoah » et transpire la haine des musulmans, le mépris des femmes et des militants de gauche.
Je simplifie pour les besoins de l’article. Ces personnages ont tous en commun de centrer tout leur discours sur des notions de race ou de religion. Ils n’ont aucune importance philosophique ou littéraire mais ils sont dangereux parce qu’ils formalisent et tentent de justifier ce qu’il y a de plus bas dans les pulsions humaines, le rejet irrationnel de l’autre, la peur de l’étranger et surtout la lâcheté qui consiste à s’en prendre si possible aux plus faibles et à leur faire porter la responsabilité, la culpabilité, de tout ce qui va mal.
Ils sont dangereux parce qu’ils représentent des courants de la non-pensée populaire qui trouvent, malgré leurs contradictions. une représentation politique commune dans le populisme de droite.
Car, bien entendu, les enjeux réellement politiques passent au second rang. Tout ce qui peut servir leur fanatisme est bon (la suprématie des Etats Unis pour les uns, la dictature syrienne pour les autres) et l’exploitation économique des humains est moins importante, à leurs yeux, que la remise en cause de leur idéologie partisane.
Le pire est qu’ils contaminent toute la politique et que nous voyons les partis « républicains » réunis au pouvoir essayer de séduire leurs partisans. Car ça les arrange, eux, qu’on ne s’occupe pas des vrais problèmes, ça les arrange que le peuple soit obnubilé par des questions sociétales comme de savoir si les homosexuels peuvent se marier ou s’il faut déchoir de la nationalité française les terroristes.
Pendant ce temps-là, on oublie que nos politiciens nous imposent la politique contre laquelle nous avons voté.
On oublie la destruction des services sociaux, la précarisation des travailleurs et l’austérité pour les plus démunis.
Pendant ce temps-là on oublie les paradis fiscaux et les diktats du FMI.
La haine empêche de penser.
