la Fédération des Œuvres Laïques cherche désespérément des logements pour accueillir les demandeurs d’asile

La Fédération des Œuvres Laïques de Haute-Savoie a mis au cœur de son action sociale de solidarité l’accueil des SDF et des migrants. Elle s’occupe précisément d’héberger les demandeurs d’asile.

Son principal souci est qu’il manque de nombreux logements sur le département pour tous les accueillir.

Stéphane Badeigts, secrétaire général de la FOL et directeur des services répond à nos questions.

CADA (Centre d’accueil de demandeurs d’asile) de Saint Jeoire


Depuis quant remonte l’accueil des demandeurs d’asile ?

Cela remonte aux années 90, quand le Conseil général nous avait confié la gestion de la Métralière et de l’auberge au plateau des Glières. Il nous propose alors de gérer également un centre à Saint-Jeoire. Qu’en faire ? Serge Gonon, directeur de la DDASS recherchait de son côté un lieu pour accueillir les demandeurs d’asile venant de Bosnie. On a donc vu une logique par rapport à ce que la FOL défend. A l’époque, la question était moins voyante, mais il n’en fallait pas moins accompagner les familles.

On a pu aménager 30 places dans le centre pour ces migrants, conjointement à des places pour loisirs, groupes et vacances.

 

Cela a-t-il été un déclic ?

En effet, un travail avec les DDASS et l’Etat s’est développé depuis.

Nous avons aussi été sollicités pour les services d’urgence et la FOL a servi d’intermédiaire pour l’hébergement. En 2006, 700 personnes étaient hébergées. Nous proposions à l’État d’accompagner ces personnes socialement dans des structures collectives (hôtels de collectivité, appartements, centres de vacances).

Deux salariées s’occupaient des 700 personnes ! Elles faisaient de la médiation sociale.

 

L’arrivée des demandeurs d’asile n’est pas aussi massive qu’on le dit

 

De quelle façon, cela a-t-il évolué ?

Le parc d’accueil a été consolidé et des accords avec des organismes sociaux ont été passés. Notre spécificité est d’accueillir le mieux possible les demandeurs d’asile en cours de procédure. Depuis 2010, la capacité du centre de Saint-Jeoire est passée à 100 places.

En HUDA (hébergement d’urgence des demandeurs d’asile) nous avons au total 450 places, auxquelles s’ajoutent 100 places en CADA (centre d’accueil des demandeurs d’asile), sur le département.

Fin 2017, le centre d’accueil et d’orientation a accueilli une soixantaine de migrants. Maintenant, une vingtaine de personnes travaillent à temps complet dans ce domaine.

 

Est-ce pour autant une arrivée massive à laquelle on assiste ?

Cela fait plus de quinze ans que je suis la question et on a eu en 2000 plus de demandeurs d’asile dans le département qu’aujourd’hui. Il faut aussi clarifier les choses, car on a tendance à faire l’amalgame entre migrants et demandeurs d’asile. La FOL travaille en direction des demandeurs d’asile et des réfugiés. C’est ce que toute démocratie doit faire. Tout le monde peut être migrant : un travailleur frontalier l’est. Les personnes qui arrivent d’autres pays européens sont souvent des migrants économiques.

La plupart du temps, les demandeurs d’Afrique, Moyen-Orient ou autres arrivent pour des raisons politiques. Ensuite vient la demande d’asile, puis le statut ou pas de réfugié.

 

Demandeur d’asile, le parcours de combattant

 

Quelle est la procédure ?

La PADA (plate-forme d’accueil des demandeurs d’asile) est gérée par la FOL. Ensuite, nous demandons un rendez-vous au GUDA (guichet unique de demande d’asile, Préfecture et OFFI (Office français de l’immigration et de l’intégration) qui les identifie et envoie ces documents à l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) qui se trouve à Paris. Cet organisme convoque les personnes à Grenoble pour un entretien sur dossier.

 

C’est un véritable parcours du combattant ?

Oui et, malheureusement, on ne peut pas répondre à toutes les demandes.

 

Que fait l’Etat et le département pour trouver des places supplémentaires ?

Il n’y a pas de moyens, mais on sent une volonté de faire, de trouver des solutions, car il y a des besoins.

Le problème dans ce département est le manque cruel de logements. L’immobilier est très cher. Un inventaire est à effectuer. Des communes se proposent pour héberger. Toute une partie des demandeurs d’asile n’est pas hébergée alors qu’elle devrait l’être. Le problème est aussi l’apport de population considérable par an sur la Haute-Savoie, soit 12 000 arrivées. S’est greffée récemment celle des Soudanais.

 

Un accompagnement très suivi

 

Comment accompagnez-vous ces demandeurs d’asile ?

On accompagne les demandeurs avec le SAIFER (service d’accompagnement et d’insertion des réfugiés).

Quand une personne devient réfugiée, le droit commun s’applique pour elle. On agit pour faciliter l’intégration, la recherche de travail. Il y a pas mal de familles monoparentales. Le public accompagné va de mineurs à des personnes de 75 ans, avec une majorité de jeunes.

On s’appuie sur des partenaires tels que le Secours populaire, catholique, la Croix Rouge. Certains sont déboutés et ne veulent pas partir. Ils sont toujours hébergés, mais on les avertit qu’ils risquent une OQTF (obligation de quitter le territoire français).

 

Quelle est la situation des mineurs isolés ?

Le Conseil départemental peut vérifier si la personne est mineure. Certains essaient de se faire passer comme tels. Une OPP (ordonnance de placement provisoire), via la protection de l’enfance et le juge des tutelles vérifient l’identité. Mais un migrant n’est pas plus malhonnête ou honnête que quiconque. Il y a, comme partout, des gens à problèmes et des demandeurs d’asile fabuleux.

 

Appel aux logements et à la solidarité

 

Quels sont les délais de demande d’asile ?

Entre six mois et un an et demi. Chacun à son travail à faire sans forcer le trait.

 

Comment peut-on s’adresser à la FOL ?

On peut contacter le 04 50 52 30 00 en cas de demande d’asile et de proposition d’hébergement. Un privé peut héberger des demandeurs d’asile. C’est tout à fait légal, à condition de ne pas en tirer profit. C’est autre chose avec des clandestins. A la FOL, les personnes accueillies sont suivies par des médiateurs sociaux. Toutes les catégories sociales sont représentées, sachant toutefois qu’il faut de l’argent pour migrer.

 

La solidarité existe-t-elle dans le département ?

On a tendance à mettre en avant les absences de solidarité, alors que de plus en plus de gens s’y consacrent. A commencer par nos salariés qui sont engagés et ne comptent pas leurs heures dans ce domaine. Il y a bien sûr les bénévoles, comme à la Halte, qui se dévouent quotidiennement. De nombreux citoyens agissent ainsi et on n’en parle pas. Nous avons eu un repas spécial pour Noël. Sans oublier, je le répète, la préfecture et la cohésion sociale qui cherchent à résoudre cette question. Reste l’interrogation pour ceux qui arrivent en bout de droit : qu’est-ce qu’on en fait ?

Je suis optimiste, mais la réalité haut-savoyarde existe : le manque de logements. C’est un véritable casse-tête.

 

Quel est votre souhait ?

Que la future loi du gouvernement supprime le délit de solidarité (un oxymore), autorise les demandeurs d’asile à travailler, un potentiel énorme pour l’économie et un bien pour leur équilibre, leur personnalité.

Notre devoir est aussi d’envoyer les enfants des familles à l’école. Ce que nous faisons à la FOL, œuvre d’éducation populaire.

Auteur: Loïc Quintin

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