Une ferme urbaine à Annecy pour un nouveau modèle économique et social

Un nouveau monde serait-il en marche ? En tous les cas, le projet de ferme urbaine, initié par l’association Fermaculture, entre dans le cadre de cette société alternative qui, ici et là, pointe de plus en plus le bout de son nez.

Le futur emplacement de la ferme

 Voici plus d’un an, quelques amis, à l’initiative de Séverine Morin, se réunissent et lancent Fermaculture « pour développer des  systèmes harmonieux pour l’Humain et la Nature conçus au travers de leurs valeurs communes. Ces valeurs sont décrites dans la « charte éthique pour un monde bienveillant ».

Ces novateurs sont issus du monde alternatif où ils œuvrent déjà. On les rencontre chez les Incroyables comestibles, ou encore les Colibris, l’ESAT (Etablissement et service d’aide par le travail), et divers mouvements sociaux. « Nous nous sommes rencontrés au sein de mouvements citoyens sur le bassin annécien ou dans le cadre professionnel. Impliqués au niveau local et très concernés par l’action sociale nous avons contribué à la mise en œuvre d’actions concrètes (mise en place d’un réseau d’agriculture urbaine sur l’agglomération annécienne et organisation d’actions festives et de sensibilisation du grand public…).

Aujourd’hui, nous avons envie d’aller plus loin et de partager ensemble un projet d’envergure, à la fois social et économique, en mettant en synergie nos compétences et nos valeurs. »

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Nicolas Guilhot

Nicolas Guilhot est l’un de ces fondateurs. « Nous nous sommes posé la question de ce qu’il fallait faire ensemble pour apporter à la collectivité. L’idée d’une ferme urbaine est apparue… »

… et ne le quitte plus, tout comme les autres membres qui s’y trouvent scotchés, tant le projet est d’envergure et de longue haleine. « Dans le durable, on n’est pas pressé. L’aubaine est venue d’un terrain disponible entre la route de Sacconges et le Semnoz. Il appartient à la ville d’Annecy. Quatre hectares sont disponibles.»

 

Un projet agricole

Un premier volet du projet concerne l’agriculture. « Nous envisageons de développer le maraîchage bio et d’y ajouter une bergerie en éco-pâturage. Le berger travaille déjà avec la ville d’Annecy. La terre et le fromage seront mis en avant, ce qui contribuera à l’économie locale. »

Entre le premier et le second volet, social, les responsables de l’association travaillent sur l’accueil pour des personnes handicapées, à mobilité réduite. « Le principal tiendra en leur présence, » précise Nicolas.

 

Un projet social

Pour le volet social, donc, le but est de sensibiliser au développement durable. La ferme urbaine pourra accueillir des enfants dans le cadre des activités scolaires et péri-scolaires. « Il s’agit de relocaliser les productions et retravailler pour un monde plus conscient des pratiques. » En outre, des formations en agro-écologie seront dispensées, ouvertes à tous, notamment en permaculture, afin de transformer les façons de jardiner.

 

Un projet créateur d’emplois

 Pour Alter’ Incub, incubateur d’innovation sociale, le projet a été reconnu innovant. Pour entrer dans les cases, selon Alter’Incub, « il faut soit répondre à des besoins sociaux non ou mal satisfaits, que ce soit dans les conditions actuelles du marché ou dans le cadre des politiques publiques, soit répondre à des besoins sociaux par une forme innovante d’entreprise, par un processus innovant de production de biens ou de services ou encore par un mode innovant d’organisation du travail. » La ferme urbaine rentre bien dans ces objectifs.

Alors, on envisage, au fur et à mesure de l’avancée du projet d’embaucher deux maraîchers, de pérenniser l’emploi du berger, de faire travailler deux animateurs agriculteurs, un ou deux animateurs pour la sensibilisation et deux animateurs pour les formations sur parcelle. « On aurait aimer commencer maintenant, mais l’agenda n’est pas facile, les dossiers administratifs se multipliant. »

Petit à petit, avec un démarrage envisagé l’été prochain, les emplois se créeront, sachant que la ferme fonctionnera sans subventions. « Nous finançons sur nos fonds propres et recherchons des financeurs. » Bien sûr il y aura aussi des recettes obtenues grâce à la vente des fromages, des produits issus du maraîchage et aux formations.

 

Les idées ne manquent pas pour créer du lien social

Des serres mobiles seront mises en place à l’été 2017, en liaison avec l’Atelier paysan. Il y aura aussi un « cuisinodrome », nom étrange qui permettra de cultiver et manger des produits de saison. « Une cuisine végétarienne sera développée de manière intergénérationnelle, afin de transmettre des anciens aux jeunes, » s’enthousiasme Nicolas. Et aussi, des paniers sociaux seront distribués gratuitement à des organismes caritatifs.

Juste à côté du terrain, les bâtiments d’un ancien élevage de poules achetés par la mairie de Seynod sont convoités par l’association, soit 6000 m2. « On travaille avec le CAUE et la maison de l’environnement. » Terrains et bâtiments seront loués aux deux mairies.

Au fur et à mesure de l’avancement du projet, les bénévoles créateurs (sept) et tous les autres s’enflamment afin de pérenniser l’idée. Déjà 93 membres ont rejoint Fermaculture. « Il s’agit surtout d’une démarche citoyenne où chacun fait sa part. » Ça ne vous rappelle pas le mouvement Colibris, cher à Pierre Rabhi ?

 

L’avenir passe par ce genre de projets

 Il existe déjà des projets similaires en France, notamment au plus près d’Annecy, la Ferme de Chosal. Ce sont des projets d’avenir qui redonnent de la force à l’économie locale et à l’action collective vues sous un angle différent de ce qui meut la société actuelle. Nicolas Guilhot n’y va pas par quatre chemins. « De tels projets porteront l’avenir de l’agglomération. » Des entreprises ont d’ailleurs rejoint l’initiative. Ce moment de transition se vit au quotidien et Nicolas considère que c’est à nous, aux citoyens de transformer les choses. « Soit on s’écroule avec le système tous ensemble, soit on transforme. Il faut agir à son niveau. »

Même si la ville d’Annecy et l’agglomération pêchent parfois par des projets surdimensionnés (centre des congrès, tunnel sous le Semnoz) ou la pollution, le manque de transports en commun, où se place celui de ferme urbaine ? « Notre volonté est d’agir pour que ça aille mieux et produire une action positive sur la cité. »

 

Alors, en attendant de visiter, gratuitement, ou participer aux différents ateliers annoncés (pour plus de détails, voir le site fermaculture.org/), les participants actuels, qui prennent leur temps pour construire la ferme urbaine – à la différence de la société actuelle qui va trop vite – clament haut et fort que « ce projet œuvre pour une société plus cohérente. »

La question sera de savoir si cette société cohérente saura déstabiliser l’économie capitaliste qui domine le monde ?

 

 

Auteur: Loïc Quintin

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