FIFDH de Genève : femmes et droits humains à l’honneur

Le 21e édition du FIFDH, qui se déroulait à Genève du 10 au 19 mars, vient de s’achever ce dimanche en livrant son très riche palmarès. Un festival de cinéma ambitieux qui célèbre la défense et la promotion des droits humains partout sur la planète et dont son turbulent voisin français, qui se targue pourtant d’être la « Patrie des droits de l’Homme », ferait bien de s’inspirer :

Alors que nous assistons éberlués au naufrage de la démocratie française, dont le pouvoir politique gouverne contre la volonté d’une majorité du peuple à coup de 49.3, nos voisins genevois organisaient la semaine passée la 21e édition du FIFDH[1]. Véritable institution en Suisse, le FIFDH, pour Festival du Film et Forum International sur les Droits Humains, se tient chaque année durant la première quinzaine de mars au cœur de la cité de Calvin, en parallèle de la session principale du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU[2].

Un évènement incontournable pour le cinéma et les droits humains

Bien loin du « glamour », des paillettes et du côté parfois superficiel du Festival de Cannes, le FIFDH se veut l’un des évènements internationaux les plus importants dédié au cinéma comme vecteur de promotion des droits humains, proposant chaque année durant dix jours des films et documentaires suivis de débats de haut niveau afin de dénoncer partout les violations faites aux droits humains. Professionnels du cinéma, mais également ONG, experts, diplomates, universitaires, artistes en tous genres, activistes, journalistes et grand public s’y rassemblent afin de témoigner et de confronter leur point de vue, les débats étant retransmis en direct sur le site du FIFDH.

Crée en novembre 2002 par le réalisateur et scénariste franco-suisse Léo Kaneman[3], co-fondé avec les journalistes Yäel Reinharz Hazan et Pierre Hazan ainsi qu’Isabelle Gattiker (directrice du FIFDH de 2015 à 2022[4]), le festival genevois est devenu au fil des années un moment incontournable pour tout ce que la planète compte de grands noms qui se mobilisent en faveur de la paix, du climat, de la biodiversité, du féminisme, de la défense des minorités, etc. C’est ainsi qu’ont pu participer aux débats du FIFDH de célèbres personnalités comme Shirin Ebadi, Joseph Stiglitz, le docteur Mukwege, Edward Snowden, Chelsea Manning, Angela Davis, Stéphane Hessel, Arundathi Roy, Edgar Morin, Leïla Shahid, Stéphane Hessel et bien d’autres.

L’activiste Rajagopal et le réalisateur Cyril Dion, autour de Jean-Valentin de Saussure (Swiss Youth for Climate) lors du FIFDH 2019 ©Benjamin Joyeux

Comme le résume Barbara Hendricks, marraine du Festival : « Le FIFDH offre un espace unique pour observer le monde, débattre, mais surtout s’engager pour que ce monde change. »

Les femmes à l’honneur

La célèbre cantatrice afro-américaine a d’ailleurs ouvert le festival de cette année aux côtés du président de la Confédération suisse Alain Berset et du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Volker Türk, qui ont rendu hommage à Sergio Vieira de Mello[5], le diplomate brésilien premier parrain du FIFDH et assassiné à Bagdad lors d’un attentat suicide en 2003. 

Le FIFDH 2023 a rassemblé plus de 29 000 personnes sur 121 évènements, avec pas moins de 220 invité.e.s de prestige. Une édition qui a fait une large place à l’émancipation des femmes et à la lutte contre les féminicides, en Iran, en Afghanistan et ailleurs, et qui a notamment mis en avant une réalisatrice arménienne, Inna Sahakyan, qui a reçu le Grand Prix de Genève (10 000 Francs suisses offerts par la ville) pour son film Aurora’s Sunrise, une œuvre contre l’oubli du génocide arménien[6]. Une autre réalisatrice, l’allemande Steffi Niederzoll, a reçu également les honneurs avec la mention spéciale du jury pour son film Seven winters in Terhan, qui dénonce l’arbitraire de la justice iranienne et la haine du régime des mollahs pour la parole des femmes.

Bien loin de la crise hexagonale des César 2023 sur l’absence de récompense pour une réalisatrice[7], le FIFDH 2023 a donc largement mis les femmes à l’honneur. Même si cette dernière édition n’échappe pas à une petite polémique comme la Suisse en a le secret[8], le festival genevois s’avère tout de même exemplaire à bien des égards.

Une source d’inspiration 

Très largement absent des médias français, le FIDH est pourtant devenu un moment incontournable du cinéma et de son rôle dans la promotion des droits humains à l’échelle internationale. Notre « pays des Lumières » (en tous cas des frères Lumières), qui sombre de plus en plus dans l’obscurité, ne cessant de régresser sur le plan démocratique, avec le passage en force sur les retraites, et sur le plan des droits humains, avec son très prochain projet de loi asile et immigration venant une fois de plus porter atteinte aux droits des étrangers, ferait bien de le promouvoir davantage et de s’en inspirer.

Comme le chantait Renaud : « Etre né sous l’signe de l’hexagone c’est pas c’qu’on fait d’mieux en c’moment ! »

Benjamin Joyeux

[1] Voir https://fifdh.org/

[2] Voir https://www.ohchr.org/fr/hr-bodies/hrc/regular-sessions/session52/regular-session

[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/L%C3%A9o_Kaneman

[4] Lire https://fifdh.org/le-festival/actualites/article/isabelle-gattiker-directrice-generale-quittera-le-fifdh-apres-la-20e-edition

[5] https://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9rgio_Vieira_de_Mello

[6] Voir le palmarès ici : https://fifdh.org/le-festival/actualites/article/palmares-2023

[7] Lire par exemple https://www.francetvinfo.fr/culture/cinema/cesar/cesar-2023-pourquoi-l-absence-de-femmes-dans-la-categorie-meilleure-realisation-fait-mauvais-genre_5645543.html

[8] Lire https://www.letemps.ch/culture/geneve-fifdh-plonge-crise

 

Auteur: Benjamin Joyeux

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