Comme chaque année à la même période , le Festival d’Alternatiba Léman a de nouveau pris ses quartiers dans Genève la semaine dernière. Face aux tensions internationales actuelles, alors que l’écologie ne semble plus du tout faire partie des priorités des politiques, les alternatives ont-elles encore la cote ? Toute la question est de réussir à atteindre un public plus large que les habituels convaincus. L’ équipe d’Alternatiba Léman, qui s’est entièrement renouvelée ces dernières années[1], y croit plus que jamais :
Du 1 au 6 septembre 2025, Alternatiba Léman a déroulé sa 11ᵉ édition dans le centre-ville de Genève, toujours fidèle à sa mission de tenter de montrer depuis 2015 les solutions en faveur de la transition écologique et sociale qui existent localement, sur l’ensemble du territoire du Grand Genève.
Organisation recentrée pour un programme toujours engagé
La semaine a débuté par cinq soirées thématiques à Uni Mail (Université de Genève) et à la MACO (Manufacture collaborative), où près d’une trentaine d’associations membres ont co-construit durant plusieurs mois un contenu dense autour de sujets d’actualité : les nouvelles façons de penser le travail, la santé globale, la décroissance ou encore les assemblées citoyennes pour tenter de renouveler les outils démocratiques[2].

Le village des Alternatives du 6 septembre 2025 ©Benjamin Joyeux
Cette année, plutôt que de multiplier les conférences pendant la semaine, le choix a été fait de ne proposer qu’un seul thème par soirée, en demandant bien en amont à toutes les organisations partenaires de travailler ensemble à faire émerger les thèmes en commun. La soirée d’ouverture du lundi était, elle, choisie par l’équipe d’Alternatiba Léman, et c’est le thème du futur collisionneur circulaire (FCC) du CERN qui est ressorti, comme nous l’explique Morgane Nusbaumer, co-présidente de l’association :
« La soirée de lancement qu’on avait choisi le lundi autour du FCC était parfaite pour Alternatiba, abordant des problématiques d’écologie, de mobilité, de démocratie, et étant en plus un projet transfrontalier ».
Une première soirée qui a provoqué quelques remous en amont avec la direction du CERN, en désaccord sur la façon de présenter le projet mais qui a finalement pu s’y exprimer par la voix de son porte-parole Arnaud Marsollier, après la prise de parole d’élus locaux et de scientifiques opposés au projet, et l’introduction des débats par Alfonso Gomez, actuel maire de Genève.
Le reste de la semaine s’est déroulé sans encombre avec cette nouvelle organisation plus concentrée qui a quelques avantages, comme le souligne Morgane Nusbaumer :
« En termes de communication, c’est beaucoup plus clair de n’avoir qu’un rendez-vous thématique par soirée plutôt que quatre. Et c’est beaucoup plus intéressant pour les associations car ça leur permet de se rencontrer avant afin de réfléchir autour d’une thématique commune »
Fréquentation habituelle
Le samedi 6 septembre, c’est comme à l’accoutumé au parc des Bastions que prenait place le village des Alternatives, permettant au public de passage de découvrir plus d’une centaine d’associations locales derrière leur stand, majoritairement genevoises mais également haut-savoyardes, comme le Collectif Co-CERNés dont la mobilisation contre le projet de FCC ne faiblit pas.
Et niveau fréquentation ?
« Je pense que l’on est sur un chiffre à peu près équivalent aux précédentes années. En revanche, ce qui a excellement bien marché, c’est un énorme espace pour les enfants que nous n’avions pas avant », nous explique la co-présidente d’Alternatiba Léman.
L’association ne dispose pas encore des remontées précises des sondages effectués par ses bénévoles et des chiffres de la buvette, mais les premières estimations font état des habituelles 2000 à 3000 personnes qui sont passées au Festival, entre les soirées thématiques de la semaine et le village du samedi.

De g. à dr. Julie Deslandes, coordinatrice, Morgane Nusbaumer, co-présidente et Blaise Thorens, co-président d’Alternatiba Léman ©Benjamin Joyeux
L’enjeu de l’élargissement
Depuis sa première édition en 2015, Alternatiba Léman se distingue par sa volonté de créer du lien, de mettre en lumière un maximum d’initiatives locales en faveur de la transition écologique et sociale et de faire converger les associations du territoire. Gratuit et ouvert à un large public, ce festival 2025 a démontré une fois de plus la richesse et la diversité du territoire genevois en matière d’alternatives locales.
Néanmoins, un constat demeure : le festival peine encore à élargir significativement son audience au-delà des cercles déjà convaincus par la nécessité de la transition écologique. Le défi du renouvellement du public, notamment chez les jeunes générations ou auprès de milieux moins sensibilisés, reste entier. Un point que l’équipe organisatrice reconnaît volontiers.
En attendant, alors qu’en France voisine les gouvernements tombent au rythme d’une crise de plus en plus flagrante de la démocratie représentative, et à la veille d’une mobilisation sociale de grande ampleur, faire le plein d’idées et d’alternatives côté genevois ne peut pas faire de mal.
A observer toutes ces initiatives citoyennes locales par rapport à notre situation nationale, on serait tenté d’être d’accord avec Henry David Thoreau lorsqu’il écrivait : « Le gouvernement le meilleur est celui qui gouverne le moins ».
Benjamin Joyeux
[1] Lire notre précédent article : https://librinfo74.fr/pour-ses-dix-ans-alternatiba-leman-cherche-le-renouvellement/
[2] Voir programme : https://alternatibaleman.org/evenements-de-la-semaine-2025/