EHPAD Les syndicats, FO et CGT (*), déplorent un manque de moyens criant

Nous avons recueilli les témoignages de deux syndicalistes : FO et CGT.  Contactée, la CFDT n’a pas souhaité répondre.

 

                                                        Alain Collard

Force ouvrière est présente dans 20 EHPAD du département, notamment dans celles de l’EPI2A.

« Depuis quelques mois, explique Alain Collard, président de l’UD retraités FO, Monsieur Rigaut, président du Grand Annecy, a pour projet de « reprendre en gestion » l’EPI2A, soit une fusion. Cela aurait pour conséquence la perte du statut hospitalier pour les 250 agents, avec rattachement à la fonction territoriale ou – pour ceux qui refuseraient – le licenciement. »

Ce refus de destruction de services vient s’ajouter aux conditions dans les EHPAD. « Nous manquons de places (environ 200 sur l’agglomération). L’ARS (Agence régionale de santé) n’a pas donné d’autorisation de construction d’établissements publics. La loi vieillissement ne prévoit rien non plus – le maintien à domicile étant privilégié. Je ne suis pas contre, mais les conditions d’encadrement sont difficiles. »

 

100 millions, dérisoire

Le syndicaliste s’inscrit en faux contre l’annonce de la ministre. « Ces 100 millions, c’est une goutte d’eau qui représente un demi-poste par établissement ! » 

Il admet cependant qu’en Haute-Savoie, « on n’est pas dans une situation extrême. Le taux d’encadrement est de 0,5 à 0,6 par résident. Mais ça comprend tout le personnel, pas seulement les aides-soignants. » Ce qui est problématique c’est que le personnel soignant va travailler en Suisse où le taux est beaucoup plus conforme aux besoins et la paie trois plus élevée.

Déjà en novembre 2017, une conférence nationale des EHPAD avait eu lieu et avait conclu à l’organisation d’une grève en janvier 2018. Et puis il y a la question de la formation. « Les personnels hésitent à la suivre, car les personnes âgées étant dépendantes, l’absence pose des problèmes. Il faudrait un personnel pour un résident. Et sur la Haute-Savoie, le besoin est de 1500 à 2000 employés ! La situation s’aggrave de jour en jour. »

Quant à la maltraitance, pour Alain Collard, elle n’est pas volontaire, mais institutionnelle. « Parfois, même souvent, on donne à manger à un pensionnaire en trois minutes ! »

 

Tarifs très élevés

C’est un des problèmes les plus importants. Le reste à charge est très lourd. « La santé est prise en charge par la sécurité sociale. La dépendance est pris en compte en partie par le conseil départemental dans le cadre du GIR (état de dépendance et de revenus). Le reste est à la charge de la personne. FO lutte pour la prise en charge à 100% par la sécurité sociale. La situation est parfois absurde. Par exemple, si une personne handicapée est prise à 100% hors EHPAD, lorsqu’elle entre dans l’établissement, ce n’est plus le cas ! »

Force ouvrière a lancé un ultimatum le 1er février, suite à la manifestation. « Nous demandons une riposte d’ensemble qui débouchera le 22 mars dans la rue. » Alain Collard confirme que rien n’a bougé du côté du gouvernement depuis le 30 janvier.

 

Que disent les chiffres départementaux ?

67 établissements sont médicalisés. 19 ne le sont pas, dont 6 résidences-services, 12 en autonomie et une EHPA. Au total on recense 86 maisons. Cela fait 5300 places dont 280 hébergements temporaires en accueil de jour. Ils sont soit en statut public hospitalier, soit en associatif à but non lucratif, ou en privé lucratif.

 

Quid du troisième âge en France ?

Le syndicaliste intègre le problème des EHPAD dans un contexte global. « Il y a 16 millions de retraités que l’on méprise. La CSG, hypocrite, n’arrange pas les choses. 8 à 10% des retraités vivent sous le seuil de pauvreté de 960€ par mois, soit plus d’un million de personnes. »

 

 

                                                               David Ferreira

La CGT est représentée par David Ferreira, jeune syndicaliste de 27 ans. Il travaille à l’EHPAD de la Fondation du Parmelan à Annecy.

« Ce n’est la maison la plus à plaindre, mais ce n’est pas non plus la panacée. »

Depuis trois ans qu’il intègre cet établissement privé à but non-lucratif, il a vu la dépendance des résidents augmenter. « J’assure la fonction d’agent de service hospitalier, c’est à dire servant les repas et effectuant le ménage. Les aides-soignants ont plus de temps à passer avec les résidents sans personnel supplémentaire. » Pourtant, on leur a parlé en formation « d’humanitude » et de bien-traitance. « Mais dans le quotidien, la charge de travail s’accroît, notamment avec la grabatisation. Malheureusement, la culture du chiffre prime. »

Absentéisme record

David, qui travaillait avant dans la sécurité, est venu à ce travail « pour faire du bien, pour les rapports humains. » « Les agents souffrent de ce travail difficile et ils sont conscients qu’ils ne sont pas, par la force des choses, bien-traitants. C’est de plus en plus la course. C’est quand même, de manière générale, un métier qui a le taux d’accident de travail et d’absentéisme le plus important en France. »

Dans son EHPAD, on dénombre 185 résidents et 130 personnels, dont 16 aides-soignants (10 pour le secteur du Parmelan, et 6 sur celui de Jeanne Antide), soit un ratio de 0,7. Dans certains établissements, on a parfois 0,3 ! « Le problème est qu’on a du mal à trouver du personnel qualifié, la profession rebutant. Le directeur est conscient du manque de moyens. Pas l’ARS. »

La CGT demande donc l’application du plan solidarité grand âge qui date de 2006 et qui n’a pas été appliqué, avec le fameux rapport 1/1.

L’emploi du temps des aides-soignants est lourd. « De 8h à 12h, deux personnels ont la responsabilité de 22 résidents. Ils prennent trente minutes de pause non-payée. Et l’après-midi, c’est reparti, avec souvent des toilettes non effectuées le matin par manque de temps. Pendant une heure, se tient un regroupement dit de « la relève », où ils évaluent les situations de résidents. Ils   réfléchissent aussi à des projets de vie individuels (non pratiqués), font des animations, couchent des personnes, s’attellent aux repas. Il faut expliquer aux familles. Certaines comprennent, d’autres non. »

 

Pour un grand service de la personne âgée

 C’est une des revendications de la CGT. « En outre, le reste à charge est énorme pour des gens qui ont connu la guerre ! C’est indécent ! » clame David Ferreira. « Il faut aussi revoir les rémunérations des salariés qui stagnent depuis des années. Quant à l’annonce de la ministre, c’est une blague. Cela représenterait 6000 € par EHPAD.

 Et la suite ? Pour le syndicaliste, il faudrait une action plus dure.

 

 

Auteur: Loïc Quintin

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