Les pêcheurs de l’Albanais attaquent la politique d’urbanisation des élus, destructrice des milieux aquatiques

L’Association agréée de pêche et de protection des milieux aquatiques, sis à Rumilly près du plan d’eau, après maintes remarques et alertes face au PLUI* du Pays d’alby, estime que ce plan ne tient pas compte de l’état des milieux aquatiques. Elle vient de déposer un recours.

 

Yohann Tranchant, administrateur de la structure, décrit tout d’abord les missions de l’AAPPMA, très ancienne. « Elle recouvre le territoire du bassin versant du Chéran jusqu’à la confluence du Fier avec le Rhône. Nous avons des liens étroits avec le syndicat du Chéran. »

500 cartes de pêche par an sont attribuées par l’intermédiaire de cette association pour un espace de 200 km de cours d’eau. Elle exploite le plan d’eau de Rumilly, notamment pour un réservoir de pêche à la mouche.

« Nos missions tournent autour d’un développement de la pêche, du tourisme de pêche, avec un volet important sur l’éducation et l’environnement. Nous avons aussi un rôle de garderie, de protection des milieux aquatiques. Par exemple, au quotidien, nous nous rendons sur le terrain pour constater des pollutions et faire remonter aux élus. Un autre volet important s’attache à la planification de l’aménagement du territoire. »

Et c’est là que l’AAPPMA entre en jeu en ce qui concerne le PLUI du Pays d’Alby-sur-Chéran. Lors de l’enquête d’utilité publique, l’association a fait part de ses remarques et interrogations sur la teneur de ce plan. Elle considérait à ce moment que « ce premier travail est incomplet, notamment au regard des ambitions affichées totalement concentrées sur la compatibilité du schéma d’assainissement avec des objectifs de développement urbanistique qui ne tiennent pas compte de l’état des milieux aquatiques et des ressources en eau. »

 

L’aménagement du territoire en cause

Plus loin, on peut lire dans cet avis adressé au commissaire enquêteur : « Les différents scénarios n’ont pas été construits en fonction d’un rapport coût économique/gain pour les écosystèmes, mais plutôt pour laisser cours à l’urbanisation excessive du territoire avec des conséquences directes sur un patrimoine naturel préservé jusqu’à présent. »

Ces remarques et alertes ont été reprises par le commissaire sous forme de « réserves ».

« Ce qui nous a étonnés, c’est que ce PLU initié par le Pays d’Alby, désormais englobé dans le Grand Annecy, n’a pas varié et aucune modification n’a été introduite. Il a été approuvé par le Grand Annecy tel quel. C’est un PLUI qui s’impose au schéma directeur sans tenir compte de l’état des milieux aquatiques. »

Malgré ces alertes de l’AAPPMA, aucune réponse n’est intervenue, aucun dialogue amorcé. Partant de cela, l’association a donc déposé ce recours le 30 septembre. « Le PLUI ne tient pas assez compte de l’état de la ressource en eau et des projections dans le futur. »

Car il y a le feu dans la demeure. La sécheresse de cet été, et qui dure, alarme encore plus. « On ne sait pas quel volume on peut prélever en eau potable. Le cycle de l’eau n’est pas évalué. On dit : attention au développement! »

Ce recours n’est pas suspensif. Mais si le tribunal le prend en compte, on reviendra au PLU antérieur et il devra être revu dans une perspective de développement durable.

Une fois encore, l’aménagement du territoire est en cause avec les pollutions, les imperméabilisations des sols. « Le manque d’eau peut contraindre l’aménagement. S’ajoutent les loisirs, comme par exemple la gestion des eaux au Semnoz (canons à neige). »

L’AAPPMA tire la sonnette d’alarme à travers ce recours. L’association Pattu de Saint-Félix s’associe à l’association de pêche concernant l’extension prévue de la zone d’activités Espace Leader. Un ruisseau est menacé, le Nant Boré, des pollutions aux hydrocarbures et déchets de bâtiments étant la cause de cette menace. « Nous allons donc ensemble contre le PLUI. »

Yohann Tranchant pose la question : « Le projet d’aménagement du territoire est-il compatible avec les milieux naturels? » Et d’ajouter que depuis des années on constate la régression du milieu, et notamment des milieux aquatiques.

 

Situation précoccupante pour les dix ans à venir

Le cri du coeur de l’AAPPMA est le respect de l’environnement. « Les débits des cours d’eau du bassin versant du Chéran tombent de plus en plus d’année en année – celui du Chéran n’a jamais été aussi bas. Par contre, les stations d’épuration tournent à plein et déversent les résidus, même traités, dans ces cours d’eau en étiage accru. »

Pour l’administrateur amoureux de la nature, une partie de cet état est due à l’évolution climatique, l’autre à l’exploitation des ressources. « Il faut avoir un principe de précaution l’avenir. Actuellement, on avance les yeux bandés. »

Pour l’AAPPMA, le PLUI doit prévoir l’évolution en fonction du long terme. En l’état, il ne respecte pas la réglementation. Le diagnostic de prélèvement doit être inscrit dans le document. C’est dans le code de l’environnement.

Pour ces raisons l’AAPPMA est passée du recours gracieux, puis, vu l’absence de discussion avec les élus, au recours contentieux.

« Malgré tout, nous sommes optimistes, car on croit à une prise de conscience de la population et des élus. Nous sommes écoutés. »

 

* PLUI : Plan Local d’urbanisme intercommunal

Auteur: Loïc Quintin

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