Les mots sont rudes, provocateurs, dans la bouche de Stéphane Espic, qui s’est fait remarquer lors des manifestations violentes des Champs Élysées. On lui reproche des dégradations de permanence LREM et divers outrages qui lui ont valu 170 heures de garde à vue . Pour lui, la politique ultra-libérale imposée par l’Union européenne s’apparente à du « néo-fascisme ». On rejoint ainsi les théories développées par Asselineau* et Étienne Chouard.
Il revendique une « défense de rupture »
Pour Stéphane Espic, la violence vient des forces de l’ordre qui ont utilisé d’emblée des méthodes répressives sur des manifestants qui revendiquaient pacifiquement le droit à l’expression.
Stéphane Espic, identifié comme « chasseur alpin », avec son teeshirt jaune et son béret « tarte » du 27ème BCA, se dit « le robin des bois européen : « Faire sortie le loup du bois ! Voler la riche commission européenne pour donner au pauvre conseil de l’Europe ce que l’Union Européenne a volé aux peuples, le rendre aux peuples par la Cour européenne des droits de l’Homme ».
Qui manipule qui ?
Stéphane Espic refuse radicalement le qualificatif « d’extrême droite », se réclamant être un « gaulliste de gauche, favorable à une société de justice sociale où le peuple aura la parole avec l’installation d’une 6éme république.
Dans cette période de confusion totale, où les réseaux sociaux deviennent les seuls points de repère pour s’informer, sans qu’il existe un véritable débat pouvant accepter des contre-arguments, on peut lire tout et son contraire, ce qui alimente la confusion. Tout est sur le même plan : mensonge ou vérité. C’est la cas du site catholique traditionaliste complotiste d’extrême droite « Pro fide catholica »de Laurent Glauzy, qui relaie une vidéo d’un gilet jaune demandant la libération de Stéphane Espic, arrêté par la police en mai 2020. Un site antisémite, anti IVG, qui explique que nous sommes sous la domination d’un complot mondial juif.
La récupération du mouvement des Gilets jaunes par l’extrême droite
Stéphane Espic a une analyse très personnelle de la présence de l’extrême droite, comme le R.N qui serait manipulée par le pouvoir macroniste.
En réponse, on pourrait se demander si l’extrême droite n’utilisent pas le mouvement des gilets jaunes pour déstabiliser le pouvoir.
Stéphane Espic a toujours répondu favorablement aux demandes d’interview sur des médias de la fachosphère. Reconnaissons que le fait de s’exprimer sur ces médias ne fait pas de Stéphane Espic un militant d’extrême droite, mais s’il estime lutter contre ses idées, il pourrait éviter de s’y exprimer leur donnant ainsi de l’audience.
La liste « Union essentielle » aux Élections régionales sur laquelle se trouvait Stéphane Espic, a obtenu au premier tour des élections régionales 0,65% sur la Région et 0,57% sur la Haute-Savoie.
Stéphane Espic, sans son béret ni son maillot « Chasseur alpin, présent à la Préfecture le 20 juin, s’exprime sur librinfo :
* François Asselineau a été mis en examen pour harcèlement et agressions sexuelles sur des jeunes membres de son parti
25 juin 2021
Pour aller plus loin sur le sujet , une analyse pertinente de Jacques Fradin entre autre …
QUI EST
FASCISTE ?
lundimatin
Macron ou son supposé adversaire
désigné comme fasciste ?
Jacques Fradin – paru dans lundimatin#215 (lundimatin-215), le 4 novembre 2019
« Depuis quelque temps, et sur le thème
du retour aux années 30, se développe un
débat sur le fascisme. Précisément,
posant les questions : qu’est-ce que le
fascisme ? Ou, qui est fasciste ? » Jacques
Fradin nous fait part de son analyse sur le
sujet en rejetant les approches qui
traitent le fascisme comme une
possibilité à venir ou événement du
passé. Selon lui : « Le fascisme est
toujours présent, non pas comme
possibilité dystopique et à venir, mais
comme état toujours présent toujours
agissant. » De Macron à l’économiste
Pierre Cahuc en pasant par Guillaume
Pepy, il s’agit alors de comprendre « qui
est fasciste ? » et comment le fascisme
opère, ici et maintenant.
Très récemment Médiapart a consacré une
série d’articles à ce sujet :
Les signaux faibles du fascisme, Joseph
Confavreux, 18 octobre 2019 ;
Et un Entretien avec Robert Paxton,
Mathieu Magnaudeix, 30 octobre 2019.
Inutile de présenter Robert Paxton, qui a
beaucoup apporté pour que l’on comprenne
le fascisme à la française (voire La France
patrie du fascisme), ce fascisme qui a fini
par être agrégé, dans l’État Français, mais
qui dépasse de loin cet épisode, comme le
montre l’Affaire Papon.
L’ouvrage de Paxton, Le Fascisme en
Action, Typologie des mouvements
fascistes, est, pour nous, aussi important
que sa participation à l’ouvrage collectif
sous la direction de Michel Dobry, Le
Mythe de l’Allergie française au fascisme.
Deux ouvrages récents relancent un débat
plus ancien :
Enzo Traverso, Les Nouveaux Visages du
Fascisme ;
Et, très récent : Ugo Palheta, La Possibilité
du Fascisme.
Nous allons ici tenter de faire
comprendre, ou simplement entrevoir, que
le fascisme n’est pas une simple possibilité
à venir, mais qu’il est déjà là, et, sans doute,
depuis un long temps déjà ; non pas une
possibilité, mais une dimension
souterraine de ce qui s’auto-désigne
« démocratie ».
Mais pour ne pas avoir à rivaliser avec des
ouvrages savants et longs, nous
n’examinerons qu’une question explosive :
Macron est-il fasciste ?
Ou, pourquoi peut-on affirmer que Macron
est fasciste ?
« Macron le fasciste » sera l’hypothèse que
nous testerons.
Et, pour effectuer ce test, nous allons
devoir transformer l’analyse du fascisme.
D’abord en passant de
l’historiographie, la notion de fascisme
étant la propriété des historiens, à la
théorie.
Ceci n’étant pas une nouveauté (pas du
tout), puisque les émigrés allemands aux
États-Unis, les émigrés juifs allemands,
mais pas seulement, après 1935-1940,
émigrés qui se sont donné pour mission,
pour vocation, de comprendre le fascisme
(et sa forme extrême, le nazisme), ces
émigrés intellectuels (philosophes ou
écrivains) ont eu la (mauvaise) surprise de
découvrir que les traits analytiques qu’ils
posaient comme étant caractéristiques du
fascisme (violence institutionnelle ou
légale, idéologie matraquée par une
propagande quotidienne, racisme ou
xénophobie, respect formel de l’État de
droit, démultiplication de la surveillance
voire des services secrets de police ou
autre, etc.), ces traits idéaux étaient, le
moins qu’on puisse dire, pertinents pour
décrire ces États-Unis, qui se proclamaient
(propagande) la meilleure des
« démocraties ».
Analyse structurale : pas question de dire
que tel ou tel chef (style Trump) était
populiste, démagogue, menteur, etc., mais
nécessité de dire que la structure politique
(dont nous venons de résumer les traits
caractéristiques) des dites « démocraties »
était analogue à celle des pays dits
fascistes.
On doit se souvenir des combats
idéologiques des années 60 : on devrait
savoir que la critique de la société des
États-Unis (avec ses Républicains), de
l’Allemagne Fédérale (d’Adenauer) et de la
France colonialiste (de Mollet à De Gaulle),
après 1945 et jusqu’à 1968, était une reprise
de l’ancienne analyse du fascisme produite
par les émigrés allemands aux États-Unis.
Et disons le fortement : si l’analyse actuelle
du fascisme est si limitée (à une
historiographie rigoriste) c’est parce que
nous nous situons dans un moment contre
révolutionnaire (au moins proto-fasciste, le
fascisme ayant toujours partie liée à la
révolution comme son négatif) où tout est
essayé pour effacer « le communisme », de
la Libération à 68.
Car si le fascisme est un anticommunisme,
il n’est qu’un petit élément
de cet anti-communisme.
Pour quelqu’un de la génération de
68 et de la critique de l’Allemagne
d’Adenauer ou de la France de De Gaulle,
ceci, que le fascisme est un descriptif
adéquat de « la démocratie », ceci était une
évidence partagée par tous les groupes
communistes combattants ; évidence qui
sera théorisée par le couple discipline /
contrôle et par l’idée de société de contrôle.
Il faut absolument lier le fascisme au
contrôle ; même si le fascisme historique
expérimental ne disposait pas des moyens
techniques de surveillance dont dispose
désormais la plus banale des
« démocraties ».
Et pour réveiller les mémoires atrophiées
par 40 années de contre révolution, ne
renvoyons qu’aux études essentielles sur
« la personnalité fasciste », ne renvoyons
qu’à Reich ou à Marcuse ; plutôt qu’à
Hannah Arendt, plus à la mode en notre
sombre époque réactionnaire (au moins
proto-fasciste).
Que signifie ce passage de l’historiographie
étriquée, descriptive, typologique, atteinte
par le fétichisme du passé (à ne surtout pas
déplacer) – l’historiographie est un socle
indispensable, mais combien insuffisant –
que signifie ce passage de l’historiographie
à la théorie politique ?
En partant des traits principaux qui
décrivent le fascisme historique, en posant
que les modèles idéal typiques de ce
fascisme sont la France, l’Espagne et le
Portugal, en déflatant l’Italie, à l’origine du
nom, et surtout l’Allemagne nazie, nous
découvrons vite que ces traits n’ont rien
d’exceptionnels et qu’ils décrivent un
ensemble de réalisations, ensemble qui
s’est prolongé bien après guerre, après la
défaite supposée (et surtout proclamée) du
fascisme. Parlons de l’Espagne ! Mais
parlons aussi de l’Allemagne Fédérale, de
la France (de l’amnistie des
« collaborateurs » et de l’amnésie d’État,
toujours Papon) et des États-Unis
protégeant le « sudisme », la forme locale
du fascisme.
Nous renvoyons toujours à ce qui était sens
commun vers 1965 et la guerre du Viet
Nam.
Ces traits caractéristiques (violence
institutionnelle ou légale, idéologie
matraquée par une propagande
quotidienne, racisme ou xénophobie,
respect formel de l’État de droit,
démultiplication de la surveillance voire
des services secrets de police ou autre, etc.)
permettent de décrire une histoire longue
contre-révolutionnaire ou anticommuniste.
Si la société se caractérise par la
guerre civile permanente, non pas la guerre
de tous contre tous, mais ce qui était,
autrefois, justement vers 1965, nommé
guerre de classe, si l’État se maintient par
la guerre civile et, donc, maintient la guerre
civile, la maintient, la tient, la contient,
l’agite comme menace, comme opération
coloniale (dragonnades et carnages) qu’il
peut à tout moment déclencher sans
déclaration, pouvoir d’exception, alors
l’éther politique est celui du conflit civil
violent et l’histoire politique suit les
méandres de cette guerre permanente, plus
ou moins froide ou chaude.
La violence est à la base de l’ordre, de la
mise en ordre.
Et ceux qui réclament l’ordre d’abord,
l’obéissance avant, justifient les violences.
Violences modulables depuis la menace,
jusqu’à l’intervention policière et judiciaire
et jusqu’au déferlement, état de siège, état
d’urgence, couvre-feu, etc.
La violence, donc, qui semble un trait
caractéristique du fascisme est bien
partagée ; ne citons que les grandes dates
de l’histoire française : 1848, 1871, 2018.
L’écrasement de la Commune de Paris lors
d’une opération militaire de style colonial
(sous le regard des occupants allemands)
n’est-ce pas déjà du fascisme ? Et qui
permet la république !
Comme l’Espagne est un royaume restauré
par la grâce de Franco !
La violence légitime de l’institution (qui
cherche à se maintenir), voilà le socle du
fascisme, voilà ce qui rend le fascisme
insubmersible.
Glissons alors vers le milicien qui prétend
réprimer au nom du droit, au nom de l’État
de droit.
Évidemment toute répression est
légale (par construction auto-justifiée :
circularité de la violence étatique). Mais
cette légalité n’a aucun autre sens que
celui d’une domination sans cesse à
réassurer ; et la constitution des faisceaux
fascistes de miliciens n’est qu’une
réassurance parmi d’autres, sans doute de
dernière instance (au sens
psychanalytique mobilisé par Althusser –
l’inconscient « démocratique » ou
républicain).
L’amour de l’ordre et de la discipline ; l’idée
qu’il est impossible de vivre sans ordre,
impossible de vivre sans ! Le légitimisme
foncier d’anciennes cibles des missions
religieuses : voilà le terreau de l’autorité, de
l’autoritarisme, de l’ordre républicain et de
toute dictature.
C’est l’esprit foncièrement anti-démocrate
ou a-démocrate, à la fois des oligarchies
ploutocrates et de leurs obligés (les
citoyens obéissants), qui est à la source du
fascisme ; l’esprit militarisé des
personnalités grégaires (en mal
d’agrégation).
Deuxième trait caractéristique du
fascisme, mais bien partagé par tous les
régimes d’ordre, de droite ou de gauche : la
légitimation et la propagande, la
légitimation par la propagande.
Le gouvernement autoritaire, ou à tendance
autocratique monarchiste ou
technocratique, énonce toujours que son
action, discipline, répression, contrôle, est
légitime. Et cette légitimité s’appuie sur un
immense appareil de propagande ;
appareillage dont l’objectif est de faire
croire que l’ordre établi est le seul possible
(TINA crie l’appareil).
Le pouvoir est d’essence religieuse : il
repose sur la croyance, sur des rituels, des
défilés, des habitudes – cela vaut pour
n’importe quel pouvoir, républicain ou
fasciste.
Nous savons que le Second Empire de
Napoléon le Petit, une des sources vives du
fascisme, avait théorisé l’usage de la
propagande, l’usage de « la presse libre ».
Propagande qui pouvait marteler que
l’Empereur, ou n’importe quel roi
républicain, était ÉLU, était l’élu ! Était le
représentant légitime désigné par
l’élection et confirmé, si besoin, par
référendums.
En camouflant la technique électorale,
charcutage, choix biaisés, et toujours le
matraquage publicitaire (qui peut dépenser
le plus gagne !) : les slogans !
Penser par slogans, par mots d’ordre (sous
le titre : tout le monde doit comprendre !),
empêcher toute réflexion, pratiquer
l’enfumage, le mensonge désinhibé,
contrôler la pensée, ne voilà pas un trait
bien commun dont le fascisme n’est qu’un
révélateur, le révélateur du mode commun
de gouvernement par l’interdiction de
penser (autrement que ne le décide le
gouvernement, l’économie obligatoire par
exemple), mode commun hérité des
théocraties ; la haine de la pensée qui
soutient la haine de la démocratie.
Arrive alors un troisième trait
partagé : le mensonge, le bagout
publicitaire (à la Trump), le secret, le
bidonnage ; regardons l’empilement des
« lois » (scélérates) pour protéger le secret :
n’est-ce pas une échelle pour accéder au
fascisme ?
Et qui dit secret dit services secrets ! Quelle
république se passe d’une surveillance
style RG : de l’information nécessaire, diton
!
Ou se passe d’un empilement de services
(tous plus secrets les uns que les autres) de
surveillance ?
Un signe indubitable de la pénétration
générale de l’esprit fasciste est bien
l’accoutumance à la surveillance ;
n’importe quel vigile peut exiger une
fouille complète ; ne parlons même pas des
aéroports et de la paranoïa qui y règne.
La paranoïa ! Trait de personnalité fasciste
(qui dicte la xénophobie ou le racisme à la
Sarkozy) ; trait caractéristique de la société
américaine.
Qui s’inquiète de la surveillance
électronique universelle (style NSA) ? Ou
s’interroge sur le développement des
logiciels d’espionnage et des startups
dédiées ? Ou des caméras à
reconnaissance faciale ? N’est-ce pas du
fascisme technicisé ? Surveillance
totalitaire, Stasi, aurait-on dit !
Et pourquoi ce qui est visiblement un
héritage, que l’on a fait fructifier, un
héritage direct des régimes expérimentaux
de surveillance globale – le fascisme
historique doit être considéré comme un
régime expérimental, comme une
expérience qu’il a fallu corriger mais
jamais rejeter, les gouvernements dits
démocratiques héritant d’un savoir-faire
inoubliable – pourquoi cet héritage n’est-il
jamais considéré pour ce qu’il est :
violence, peur, terrorisme d’État ?
Parce qu’un voile de mensonge (et
d’ignorance et de propagande) transforme
notre vision brute des actes de violence, de
surveillance ou de mensonges éhontés, en
regard Disney, nous devenons des
« somnambules » guidés par des voix
enjôleuses.
La prétention démocratique !
Nous sommes en démocratie !
Et ce mensonge martelé agit comme une
drogue hallucinante.
Mais quel « conducteur » n’est pas élu ?
Voire est l’élu !
Quelle dictature ne résulte pas d’élections
ou ne s’appuie pas sur des élections ?
Y a-t-il des États sans droit ? Sans État de
droit ?
Même l’intervention la plus arbitraire se
légitime d’un droit !
Qu’est-ce qu’une justice indépendante ?
Les juges nazis n’ont-ils pas été
reconduits ? Comme les policiers français
lors de la grande amnistie (qui conduisit
les maquisards résistants, terroristes, en
prison, après « la libération » !)
Existe-t-il des actions policières illégales ?
Ou hors la loi ? Et de quel droit parle-t-on ?
Il faut un vaste régime néo-religieux,
réactivant les plus infantiles soumissions
(à une religion de tradition familiale), pour
permettre ce somnambulisme : toute
république (qui se prétend démocratique)
comme tout régime d’ordre (plus ou moins
durci) exigent des légions de somnambules
(des zombies !) – le légitimisme sans
pensée, voilà une clé du fascisme et de tout
gouvernement ; l’interdiction de penser, le
dressage intellectuel, la lutte contre la
culture critique, voilà une autre clé
commune.
Résumons : dans une série de textes
estivaux, pour agrémenter le pastis à la
plage, nous avons introduit le concept de
DESPOTISME [1].
Le Despotisme recouvre des formes
variables et diverses de gouvernement :
De ce qui se prétend démocratie ou
république, etc., république monarchique
autoritaire ou technocratique et glissant
vers le policier sécuritaire ;
Puis la quasi dictature, avec l’État
d’Urgence permanent, jusqu’au fameux
fascisme des historiens.
Il faut donc parler en termes de despotisme
incluant le fascisme comme un état de ce
despotisme ; mais il faut parler de la
république de la même manière, comme un
état du despotisme.
Ce qui permet de dire : le fascisme n’est pas
une possibilité à venir, c’est une actualité
permanente, un état du despotisme,
despotisme qui est le régime évolutif et
variable dans lequel nous sommes jetés.
Les formes variables du despotisme ne
sont pas exclusives ; toujours la discipline
soutient le contrôle, avec des mélanges
opportunistes : un gouvernement dit
démocratique d’extrême centre peut
soudainement se transporter à la droite
extrême en ressuscitant les techniques
fascistes, les milices par exemple.
Les états du despotisme, république
parlementaire, technocratie, état de police,
peuvent se convertir les uns dans les
autres, les uns avec les autres, selon
l’opportunité et les circonstances ; une soidisant
démocratie peut devenir du jour au
lendemain un état policier, et ce, par la
grâce d’un gouvernement « de gauche »,
d’un gouvernement « socialiste »,
mollétisme appliqué ! Ou blairisme
d’opportunité !
Et de telles mutations internes, plus ou
moins accélérées, peuvent se produire sans
que personne n’y voit goutte ou n’y trouve à
redire. La prégnance du fascisme est telle
que tout esprit démocratique (ou de
résistance) est pulvérisé. Le mouvement
récent, dit de dé-démocratisation, vers
l’autoritarisme sécuritaire est à la fois bien
documenté (lire Wendy Brown) et, en
même temps, ignoré, dénié.
Disons alors, pour insister :
Entre la soi-disant démocratie ou la
république ploutocrate avec ses
technocrates corrompus, et le dit fascisme
historique, il n’y a pas de différence de
nature, il n’y a qu’une différence de degrés
dans le chemin vers l’autoritarisme.
Ce ne sont pas les fascistes désignés par le
pouvoir, en un geste fasciste, qui menacent
(dans l’à venir), ce sont les technocrates
armés (et enfermés dans leur idéologie) qui
non seulement menacent mais exécutent
(aujourd’hui).
Il n’a jamais existé, sauf moment
révolutionnaire, de démocratie véritable.
Et c’est l’insurrection de ces moments
démocratiques, car il n’y a de démocratie
que par l’insurrection [2], qui explique la
réaction contre-révolutionnaire,
l’amplification des moments
révolutionnaires « communistes »
conduisant au durcissement de la
répression, des ratonades coloniales à
l’extermination militaire et au fascisme.
Au fascisme comme état interne du
despotisme, non pas comme possibilité
externe.
Le noyau du fascisme est à trouver dans
l’anti-communisme ; mais cet anticommunisme
caractérise toutes les formes
possibles du despotisme et, donc, n’est pas
spécifique au fascisme. Ce noyau fasciste
est bien commun aux dites démocraties
parlementaires autant qu’aux régimes
militaires de redressement moral.
Comme ce qui caractérise le despotisme
est le rejet dégoûté de toute démocratie (ou
de toute forme insurrectionnelle) il est
normal que l’on retrouve partout, dans tous
les états du despotisme, la lutte contre la
démocratie ; qui se confond avec la lutte
contre le communisme.
Alors Macron est-il notre nouveau
Franz von Papen ? Ou notre nouveau
Thiers ? Qui n’a pas besoin du fascisme (au
sens ordinaire), qui peut même prétendre
le combattre, tout en adoptant une posture
autoritaire technocrate racialiste, parce
qu’il est habité par la foi révolutionnaire
(de la révolution conservatrice), parce qu’il
est porteur d’une idéologie générant la
violence.
Macron est donc un fasciste, disons un
pétainiste. Seulement déguisé !
Si le terme fascisme est peut-être
adapté à un point de vue descriptif
historiographique, c’est la désignation du
mouvement révolutionnaire (conservateur)
par lui-même, mais le cas espagnol devrait
servir de modèle plutôt que le cas italien, il
n’est plus pertinent d’un point de vue
analytique.
Il faut alors parler du despotisme
économique, du capitalisme comme
régime de domination politique, avec
l’ordre de l’entreprise au centre, on peut
parler de ploutocratie.
Et le fascisme n’est pas une possibilité à
venir de ce despotisme ; il en est une
dimension intégrale, dimension enfouie
qui se révèle opportunément lorsque ce
despotisme quitte les eaux tranquilles de la
servitude sans résistance, lorsque le
despotisme (« de droit divin ») se sent
menacé.
État de siège, État d’urgence, État
d’exception, article 16 de notre constitution
chérie, qui sont autant de dimensions
dictatoriales, fascistes, mais cachées,
cependant bien présentes, activables à la
commande.
Pour le dire autrement : si un groupe
désigné comme fasciste par des
adversaires (aussi fascistes que ceux qu’ils
dénoncent) arrivait légalement (par les
méthodes électorales ordinaires – ce qui
impliquerait un contrôle de l’information,
ce contrôle que détient le gouvernement en
guise de clause de no entry), arrivait
légalement au pouvoir, il n’aurait rien de
spécial à faire, que de mettre en oeuvre les
ressorts autoritaires du despotisme, rien de
spécial à faire que de copier ce qui se
pratique communément, de la désignation
des préfets à la désignation des juges.
Et, peut-être, au lieu de trouver un contrôle
serré de l’éducation et de l’information
d’abord dans un sens favorable à
l’entreprise (culture économique
d’entreprise) nous pourrions trouver un
contrôle de l’éducation dans un sens plus
conservateur religieux, plus évangélique ou
baptiste – mais c’est plutôt un mélange de
culture d’entreprise (néolibéralisme) et de
culture conservatrice (républicaine) que
nous devrions trouver, Blanquer pouvant
parfaitement servir de pont.
Si l’on veut, et pour simplifier à
l’extrême, posons que le despotisme est
notre « matière », ce dans quoi nous
sommes incarcérés : le régime politique de
l’économie dominante avec ses règles
irréfragables de compétition,
d’individualisation, de division (politique
du travail), d’efficacité, le réalisme
capitaliste [3].
Cette « matière » présente des états :
les états de la matière : le parlementarisme
croupion, la dite « démocratie » (encadrée,
surveillée, enfermée, humiliée), la
technocratie (le gouvernement de « la
caste »), l’autoritarisme (lorsque Noske se
réveille en Castaner (ou castagneur), après
un long sommeil dogmatique), la dictature
d’un état d’urgence, le fascisme (avec
milices, vigiles et bandes de « gros bras »).
Les états de la matière ont tous pour
fonction de protéger & défendre les règles
économiques (ou la propriété, comme on
disait autrefois – l’épargne placée et qui
doit rapporter).
Ces états ne sont pas exclusifs les uns des
autres ; au contraire, ils peuvent se
superposer en couches : la matière est
feuilletée ; et les feuilletages ou les
couches peuvent s’interpénétrer ; on
parlerait d’une métaphore géologique.
Les couches sont toujours présentes et en
mouvement permanent : elles peuvent se
mélanger, ou l’une, passagèrement
(opportunément), peut supplanter les
autres et les renvoyer au fond (effet d’un
article 16).
Ainsi le fascisme est-il toujours présent,
non pas comme possibilité dystopique et à
venir, mais comme état toujours présent
toujours agissant.
Macron se présente comme un rempart
face au fascisme (attribué aux concurrents
qu’il veut disqualifier). Il tente ainsi de
verrouiller l’avenir : n’est-ce pas une bonne
méthode fasciste (moi ou le chaos, moi ou
la terreur, moi ou la ruine, etc.) ?
Et cela, de plus, est une « opération de
com » ! De la bonne propagande à
l’ancienne, relayée par des réseaux
contrôlés ! Nouveau trait fasciste : le
contrôle de l’information, le mensonge !
La censure à l’ancienne qui réapparaît
brutalement, à mesure que l’atmosphère se
charge. Posons alors la question :
Qu’est-ce qui distingue un
gouvernement bourgeois (des patrons, des
propriétaires ou des financiers) répressif,
autoritaire puis militarisé, style Monarchie
de Juillet et sa descendance républicaine,
toujours Thiers, gouvernement dont le
credo est : ordre & obéissance (aux lois de
l’économie), dont ce credo est l’expression
d’une idéologie, d’une croyance (relire
Stiglitz, cité en note 3), celle du
« développement économique libéré »
(enrichissez-vous), idéologie armée qui
peut se dire « révolutionnaire » [4] : tout le
pouvoir aux entrepreneurs pour la
croissance illimitée et pour le bien de tous
(de nouveau, lire la critique exhaustive de
cette idéologie, de ce mensonge religieux,
de l’hypocrisie ploutocrate, par Stiglitz),
qu’est-ce qui distingue un gouvernement
autoritaire des capitalistes (gouvernement
allumé à l’idéologie), qu’est-ce qui
distingue une ploutocratie offensive et un
gouvernement fasciste (converti au
néolibéralisme, style brésilien [5]) ?
Qu’est-ce qui distingue une
monarchie républicaine, avec ses tics de
courtisanerie, avec un monarque
intouchable (déifié comme guide suprême),
avec une censure autocratique, et des
milices armées, monarchie comprenant
l’impossibilité de mettre en cause la
définition économique de l’ordre (où l’ordre
est supposé être égal à la démocratie),
qu’est-ce qui distingue cette monarchie
d’un régime à idéologie obligatoire
(toujours celui de l’économie) ?
Qu’est-ce qui distingue le directeur
Blanquer d’un quelconque agent des
services ?
Qu’est-ce qui distingue le plus ancien
« diviser pour régner » (à la base de la
présente république) de toutes les
stigmatisations spécifiques (comme le
racisme et le racisme anti-pauvres – les
sans dents !) et de la criminalisation
permanente de tous les stigmatisés ?
Là où apparaît toujours un bouc émissaire !
Là où chacun peut se dire : ce n’est pas moi
qui suis visé, je ne suis pas concerné, ni
pauvre, ni chômeur (assisté ou welfare
queen), ni cheminot, ni gilet jaune, ni
indigène, ni musulman, ni femme indigène
pauvre (et voilée), etc. Le trait
caractéristique des régimes fascistes : la
fracturation sociale, l’indifférence de
protection. LA PEUR.
On retrouve, en plein république, la plus
vieille méthode de la stratification sociale,
avec des épargnés indifférents (les
épargnants, les bobos des villes
impériales), des ploutocrates heureux qui
impulsent la ségrégation (comme outil
économique de l’efficacité), et les ennemis
à abattre.
Indifférence, repli, individualisation,
atomisation, guerre à la pensée critique,
nouvelle censure (par l’argent),
reconfiguration de l’enseignement en
dressage économique.
L’observation de la révolution contrerévolutionnaire,
du redressement
économique par la violence (se rappeler
l’affaire des lois travaille – nous arriverons
au dogmaticien Pierre Cahuc un peu plus
loin), l’instauration du « risque partagé »,
l’arbitraire, l’incertitude légale pour les
classes inférieurs, tout ce qui soulève
l’ahurissement des esprits sains, tout cela
désigne une guerre sauvage menée par des
revanchards (sarkozystes – Macron et la
commission Attali).
Alors qu’est-ce qui distingue cette guerre
sociale, cette guerre civile CONDUITE par
des technocrates à l’idéologie armée et
RÉALISÉE par des milices brutales aux
ordres (les forces de l’ordre), qu’est-ce qui
distingue cette guerre de classe (contre les
nouveaux Canuts ubérisés) CONDUITE par
des prophètes hallucinés, reprenant le plus
vieux chant du « don de soi », de la
certitude et de la vérité, qu’est-ce qui
distingue cette destruction systématique
de la violence fasciste ?
Limitation du droit de grève, limitation du
droit syndical, limitation du droit de
manifester, dictature de « la
représentation » (disqualification de toute
autre voix), puis (don de dieu) guerre contre
le terrorisme, ébauche d’un pouvoir
militaire dictatorial menant la guerre
(conte le terrorisme) à l’infini, etc.
Où trouver la spécificité du fascisme ?
Il y a déjà, maintenant (et pas dans l’à
venir), une extrémalisation de tous les
traits autoritaires que recèle tout régime
dit démocratique mais à ordre économique
obligatoire ou imposé. Encore une fois,
pour parler du fascisme supposé
extraordinaire, limite ou tendance
cependant irrépressible, il faut d’abord
parler du despotisme commun.
Macron est peut-être libéral, au sens
économique, certainement pas au sens
politique – c’est un technocrate
narcissique – il n’est certainement pas
« démocrate » : son libéralisme est antidémocratique
(comme tout libéralisme
économique).
Macron n’est pas un bouclier qui
protégerait du fascisme, c’est un versaillais
autoritaire qui joue de la PEUR, manipule la
PEUR, comme la peur du fascisme
fantasmé (puisqu’il est déjà là !) pour mieux
cacher la pulsion autoritaire (et infantile)
qui mène le gouvernement Macron à droite
toute et vers la droite la plus extrême
(toujours le conseil sarkozyste de
« braconner » dans les terriers les plus
glauques du racisme).
S’il y a donc une « possibilité du fascisme »,
elle se tient, armée, devant nous, dans la
bande des technocrates allumés.
Rappelons que dans le monde pétainiste
français (notre modèle du fascisme) – en
1940 comme en 2015, il y a deux groupes
pour faire fonctionner ou tourner ce
fascisme à la française (de tradition très
ancienne, thermidorienne anticommuniste,
toujours 1848 et 1871),
l’extrême centre thermidorien de la
technocratie économique acoquinée au
monde patronal (patrons, patronages,
guides, conducteurs, entrepreneurs, etc.) et
la droite extrême milicienne de la lutte
armée (contre l’ennemi intérieur,
aujourd’hui l’indigène, le musulman, etc.).
Et pour tenir ces deux forces énergétiques
(de la dynamo pétainiste) il faut un bouc
émissaire, un ennemi désigné par l’autorité
(religieuse) supérieure.
Républicains (marcheurs au pas) et
Nationaux (de la chasse au bouc), loin de
s’opposer, constituent une unique machine,
d’abord une machine à produire du mirage :
celui de l’opposition entre démocrates et
fascistes !
Républicains et Nationaux profitent à part
égale de cette gigantesque illusion.
Le style de « choix électoral » (cuvée
2017 à renouveler) entre un technocrate
pétainiste et un milicien agité par la
revanche coloniale, tous deux également
néolibéraux mais avançant masqués pour
un carnaval raciste (démagogique), le
« choix » entre deux engrenages d’une
unique machine de destruction, ce
« choix » (évidemment truqué) doit être
refusé : DÉSERTION, partir au maquis,
recours aux forêts, rejet de la fonction
« citoyenne ».
La lutte contre le fascisme implique
donc le rejet de l’économie, la sortie de
l’économie.
Autant que l’économie est la puissance
agissante (matérielle, idéologique,
dogmatique), est l’infrastructure du
despotisme (dont le technocratisme et le
fascisme milicien ne sont que deux états
imbriqués).
Le nouveau pétainisme (à deux pôles,
technocrate + milicien) exige la fuite en
avant productiviste et repose sur cette fuite
(il vend du bonheur consumériste). Mais il
manipule, en arrière-plan, la peur,
l’angoisse, l’épouvante, le cauchemar
dystopique du MANQUE, des restrictions,
du contingentement, du retour au
rationnement.
L’économie ne tient, malgré les
inégalités fantastiques (qu’il faut dénier :
voilà un objet pour le racisme, la
dénégation offensive), que par le mirage de
la consommation croissante, le mirage de
la croissance retrouvée (que Stiglitz chérit
encore).
Mais comme ce dilemme : croissance
nécessaire (pour maintenir l’ordre)
croissance impossible (pour raisons
écologiques), comme ce dilemme est
« disruptif » ou est lourd d’insurrections, le
capitalisme doit se militariser, passer à
l’état fasciste, n’accepter aucune
contestation (surtout aucune contestation
de l’ordre économique) [6].
Et, en particulier, mobiliser ses
idéologues, comme l’économiste de cour
Pierre Cahuc, le père sous X de la loi
travaille. Bien sûr les courtisans (ou
conseillers occultes) constituent des
bandes ; à Pierre Cahuc il faudrait rajouter
Philippe Aghion et, plus, peut-être, un
proche de Macron, Marc Ferraci, préposé à
la surveillance de la DRH Muriel Pénicaud.
Néanmoins nous résumerons cette bande
sous le nom CAHUC.
L’économiste Pierre Cahuc, en tant
qu’économiste « scientifique », est un
idéologue du retour au servage [7], le travail
ubérisé, comme « solution » au problème
du chômage ; après tout, il n’y a pas de
chômeurs dans un système esclavagiste de
STO ! Et voilà la grande découverte : il n’y a
plus de chômeurs lorsque le droit de
protection du travail (et des travailleurs) a
été aboli, lorsque tout chômeur DOIT
travailler sous peine de mort, par
suppression de toute allocation,
rémunération, etc. Il n’y a plus de chômage
lorsqu’il n’est plus possible d’établir une
différence entre chômage et misère
mortelle.
Le STO, n’est-ce pas une invention
fasciste ?
Le retour aux Misérables et (encore =
modernisation) à la Monarchie de Juillet, le
cadre des Canuts et des Misérables, n’estce
pas l’objectif grandiose de l’économiste
de cour, qui ne jure que par « le travail sans
qualité », les livreurs fliqués et exploités,
qui ne jure que par le travail abstrait
concrétisé !
Si la bourgeoisie à l’ancienne moralisait en
clamant : tout travail mérite salaire, la
nouvelle bourgeoisie fasciste crie : tout
salaire exige n’importe quel boulot
merdique (même les bagnards sont nourris,
quel désastre !).
Bien sûr, nous pouvons dire que
l’économiste Cahuc (et en tant
qu’économiste « scientifique ») est un fieffé
réactionnaire (qui vise le retour à la grande
époque bourgeoise du 19 siècle !). Mais
l’économiste Cahuc n’est-il pas plutôt
fasciste ? Autant que le fascisme reposait
sur la soumission totale, sur « les contrats
de mission » comme forme de soumission,
sous missions pour sous hommes ?
STO mon amour !
Posons alors au chevalier de la science
(nobélisable après le prophète Jean ?) un
problème un peu plus compliqué que celui
qu’il a l’habitude de traiter (Cahuc ne
traitant que des problèmes réduits
idéologiquement : les salariés ne sont pas
des êtres humains mais de lignes de
compte).
Supposons que le travail ait deux
dimensions et pas seulement une seule : la
e
quantité, l’emploi, et la qualité, la
démocratie au travail et le travail comme
producteur de démocratie. Supposons que
nous n’acceptions pas le réductionnisme
quantitatif (le nombre et le compte) qui
oblitère tous les raisonnements
économiques, et ceux de Cahuc en
particulier : combien d’emplois de livreurs
ubérisés ?, et que nous placions la qualité
du travail au-dessus de la quantité
(renvoyons à Stiglitz, ouvrage cité en note
3, pour plus de détails).
Qualité du travail : travailler dans un
collectif démocratique d’auto-organisation
ou, au moins, de participation aux
décisions – conseils d’administration qui
ne seraient plus réservés aux
« propriétaires ».
Qualité du travail : le rejet du despotisme
d’entreprise, fondé sur le pouvoir des
« actionnaires », comme élément décisif de
la démocratie (politique) et du refus du
despotisme global – qui commence
toujours au travail.
Alors, Monsieur le Chevalier Cahuc, quelles
« règles » préconiseriez-vous pour assurer
« le plein emploi », plein emploi consistant
en travail démocratiquement organisé ou
en travail d’impulsion de la démocratie
(sortie du despotisme) ?
Voilà un problème plus difficile que celui
qui consiste à gérer un état lamentable, en
considérant (implicitement ou pas) cet état
comme indépassable (toujours TINA,
toujours la structure hiérarchique
considérée comme « naturelle »).
Le problème que se pose à lui-même le
Chevalier Cahuc, sous l’ordre de ses
maîtres despotes, celui de la simple
quantité d’emploi, à état hiérarchique
donné, quelle que soit la qualité, ou même
avec une qualité dégradée (cette
dégradation supposée nécessaire pour
assurer « le plein emploi ») et faisant
tendre le travail vers le servage (toujours
les Canuts) en maintenant l’ordre
despotique, avec la peur & l’obéissance, ce
problème réduit est une caricature.
Il est désolant que des personnages
« instruits », formés dans les écoles et les
universités ouvertes, se soient transformés
en idéologues esclavagistes (« sudistes ») !
Dira-t-on que Macron est « intelligent » ?
Certainement pas, lui qui a utilisé « sa
formation » pour devenir une sorte de
réincarnation tardive (et démodée) de ce
que le néolibéralisme propose de pire –
aucune invention, aucune imagination,
aucun travail d’innovation – la
« révolution » proposée n’étant qu’une copie
sans âme, rédigée par une intelligence
dévoyée ou corrompue. Macron est la
caricature du « bon élève » (et peut-être pas
le gendre parfait !).
Et la corruption des oligarques (de la caste)
s’étend à leurs employés, aux chevaliers de
la science – pour résoudre des problèmes
simplistes, quelle « intelligence » faut-il ?
Le Chevalier Cahuc « cherche » l’emploi qui
conforte l’ordre despotique, avec la PEUR
comme aiguillon.
Allez, donnez-vous de la peine, autoentrepreneurs,
investissez dans des
camions, des food trucks !
C’est pourquoi nous pouvons dire : comme
son patron, Cahuc est un fasciste, pétri de
méchanceté, incapable d’invention. Il ne
pense qu’en termes d’obéissance par la
peur, en termes d’ordre par la violence.
Au lieu de se perdre dans des débats
historiographiques (pour faire plaisir aux
maîtres), la question du fascisme aurait dû
être très simple : c’est la question de l’ordre,
de la hiérarchie et de l’obéissance, de
l’ordre à réaliser par tous les moyens,
essentiellement violents, du licenciement
facilité au jeu des milices et à la justice
expéditive (pour les plus pauvres ! – le cas
Sarkozy pouvant servir de contreexemple
!), moyens dont l’objectif est de
susciter la PEUR, fermer les esprits (y
compris, par contagion, ceux des
chevaliers et de leurs maîtres), empêcher
toute pensée, ne parlons même pas de
pensée critique !
Revenons aux pensées sûres des années
1960 !
Pourquoi l’ordre et l’obéissance, son ombre,
devraient-ils venir avant tout ?
Regardons l’opportuniste Guillaume Pepy,
le plus médiocre, qui cherche à imposer la
casse violente, décidée au château, qui
cherche à anéantir toutes les structures de
défense des salariés pour transformer ces
salariés en travail abstrait , comptable,
évaluable, négociable (sur un futur marché
avec des esclaves en vitrine).
Comme tout bon fasciste ne doit-il pas
mettre en scène la fable du « bouc
émissaire », du « protégé », du « planqué »,
qui devrait être ramené au pas commun de
la servitude commune et envoyé au front
(de la privatisation) dans des bataillons
disciplinaires ?
Quelle est la différence entre « un gros
bras » milicien qui tabasse à mort des
manifestants ou des émigrés, tous les
nouveaux ennemis désignés, et Guillaume
Pepy « la petite frappe », le casseur
institutionnel qui met à mort, par
opportunisme, pour la carrière, et avec
indifférence, et en toute sûreté ?
Le premier représente une violence
individuelle (mais qui est toujours
incorporée, constituée en corps de
violence) qu’il est, peut-être, facile de
combattre corps à corps ; mais le second,
dans toute sa faiblesse physique voire
maladive, représente la violence
institutionnelle, la criminalité en col blanc,
l’espace mafieux des gouvernements,
violence diffuse qui ne peut être combattue
qu’en se démultipliant aux différents
niveaux qui organisent les institutions :
combattre le pouvoir exorbitant des
entreprises et de leurs chefs, combattre le
pacte mafieux enregistré dans l’idéologie
technocratique, ne pas hésiter à mettre en
cause les capacités personnelles [8].
Si Cahuc est un faux scientifique mais un
vrai dogmaticien, c’est parce que son esprit
a été mal éduqué ; si Guillaume Pepy est un
personnage sartrien, un salaud, un pur
agent criminel d’une bande mafieuse, c’est
parce que l’impunité, la sûreté de pouvoir
faire n’importe quoi, lui a « donné une
grosse tête », si grosse qu’il ne peut plus la
porter.
Voilà ainsi une phénoménologie
limitée du gouvernement « démocratique »
qui mène à l’incapacité de distinguer entre
la répression républicaine et la répression
fasciste. Différence de degré seulement (et
parfois).
Contrairement à ce qui a pu être écrit, il n’y
a pas « possibilité du fascisme », il y a
présence constante du fascisme comme
ombre, support, compagnon indéfectible de
la dite démocratie du parlementarisme
ploutocrate.
Si donc le fascisme est un adversaire, plus,
un ennemi (dans la guerre civile
permanente), il n’est ennemi qu’autant qu’il
est un état mobilisable du despotisme
économique.
[1] Qu’est-ce que le Despotisme économique ?
LM 203, 6 août 2019, LM 204, 16 août 2019, LM 205,
23 août 2019, LM 206, 9 septembre 2019.
[2] Renvoyons à notre texte, L’Insurrection des
Gilets Jaunes, LM 192, 21 mai 2019.
[3] En compléments de notre série, citée à la note 1,
renvoyons à :
Mark Fisher, Le Réalisme Capitaliste, qui peut se
lire comme une reprise actualisée des thèses de
l’École Critique (les Allemands émigrés), un
descriptif des nouveaux systèmes de contrôle, en
insistant sur le contrôle de la pensée et de
l’éducation – point n’est besoin d’un fascisme à
l’ancienne pour exécuter le projet fasciste de la
surveillance (néo-théologique ou néo-théocratique),
un gouvernement néolibéral technocrate y suffit
bien, enfermé dans ses dogmes idéologiques.
Et sur l’assaut contre « la classe ouvrière » ou contre
les travailleurs, sur la volonté de briser toute
résistance et de pousser à l’adaptation forcée (à
l’économie) :
Gérard Filoche, Macron ou la Casse Sociale ;
Romaric Godin, La Guerre Sociale en France ;
Enfin le nouvel ouvrage de Joseph Stiglitz, Peuple,
Pouvoir et Profits, peut se lire comme une analyse
détaillée, sur le cas des États-Unis, de la guerre
sociale et de ses objectifs économiques ; guerre
civile qui met en oeuvre les trois piliers du
fascisme : la violence, souvent armée, la destruction
systématique de l’éducation ou l’assaut contre la
culture, la « révolution » (conservatrice) ou l’action
impulsée par l’idéologie, la croyance.
Le livre de Stiglitz parle de Trump le démagogue ;
mais les analyses peuvent s’appliquer sans
difficulté à notre guide national.
De plus, il convient d’étudier la critique, que mène
Stiglitz, grand économiste keynésien, socialdémocrate
à l’ancienne, la critique de la dogmatique
néolibérale (de l’économie de l’offre) ; la pensée
économique néolibérale (Reagan, Thatcher),
adoptée par les nouveaux sociaux-libéraux
(Mitterrand, Blair, Hollande), est déconstruite
comme simple idéologie, mythologie ; la mythologie
directrice (de la révolution conservatrice) étant,
peut-être, le trait fasciste par excellence de cette
« révolution » contre révolutionnaire.
[4] Renvoyons au célèbre ouvrage de Macron,
Révolution, qui reprend (sans le savoir ?) le thème
archi-usé de toutes les droites (« révolutionnaires »),
de toutes les droites fascistes ; car « la révolution »
de Macron (« la modernisation » des élites
pétainistes) est évidemment une révolution
conservatrice, une rétrovolution.
[5] Notre article, Fascisme ou économisme ultra :
nous voulons les deux, LM 164, 8 novembre 2018.
[6] Nous avons traité cette question extensivement
in La Voie Pauvre, LM 186, 9 avril 2019.
[7] Pierre Cahuc est un idéologue du retour au
servage, comme tous les économistes
« scientifiques » (libéraux, néolibéraux, ultralibéraux),
comme son collègue, plus prestigieux,
Jean Tirole ; lire Le Prophète de la Soumission, LM
114, 24 septembre 2017.
[8] Pour aller plus loin sur cette question de la
violence, sur cet engrenage qui lie « démocratie » et
fascisme, voir notre article, Violence légitime ou
légitime défense, LM 168, 7 décembre 2018.
Jacques Fradin (Jacques-Fradin) Économiste anti-économique,
mathématicien en guerre contre l’évaluation, Jacques Fradin mène
depuis 40 ans un minutieux travail de généalogie du capitalisme.