Réforme du droit du travail : « travailler plus sans gagner plus ».
Pour Emmanuel Macron, le ministre de l’économie, il y aurait désormais urgence à permettre aux salariés français de « travailler plus sans gagner plus », comme il l’a déclaré le 22 janvier dernier à Davos. Et ce que l’on apprend du futur projet de loi préparée par Myriam El Khomri, la ministre du travail, confirme la volonté du gouvernement d’aller vite et loin dans cette direction.
Ce texte, qui prévoit un assouplissement du code et du marché du travail, doit être présenté lors du conseil des ministres du 9 mars.
Selon la ministre, « le débat va être très nourri, car il y a un changement de philosophie important. » Selon elle, il s’agit de « garantir davantage les droits réels (?) et rendre les entreprises plus compétitives. »
Un des points essentiels de ce projet est que : « la primauté de l’accord d’entreprise en matière de durée du travail devient le principe de droit commun. »
La durée quotidienne du travail effectif par salarié ne pourra excéder 10 heures. Jusqu’ici il fallait une autorisation pour dépasser ce temps. À l’avenir un accord de branche ou d’entreprise pourra prévoir un dépassement jusqu’à 12 heures.
Les entreprises pourront également moduler le temps de travail sur l’année et même au-delà. Sur une période de 16 semaines, la durée hebdomadaire de travail pourrait aller jusqu’à 44 heures, voire 46 en cas d’accord. Le maximum hebdomadaire reste de 48 heures.
La durée légale hebdomadaire demeure cependant de 35 heures (pour le décor), seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Celles-ci bénéficieront d’une majoration minimum de 10 %. Les branches n’auront plus le pouvoir d’empêcher les entreprises de descendre sous le seuil des 25 %, comme c’est le cas actuellement.
Le texte réforme le licenciement économique en élargissant fortement la définition du motif économique dans laquelle seront prises en compte toutes les « difficultés économiques », les « mutations technologiques » ainsi que toutes « réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité ».
Ajoutez à cela que tout salarié qui refuserait un accord d’entreprise serait licencié pour motif personnel (et donc sans les obligations de reclassement qui s’imposent à l’employeur dans le cas du licenciement économique).
Ces accords devront être signés par les syndicats représentant 50 % des salariés. Sinon, lorsqu’un accord aura recueilli l’aval des syndicats représentant « au moins 30 % » ces organisations pourront demander une « consultation des salariés visant à valider l’accord ».
Ils peuvent être révisés ou suspendus si l’entreprise se porte mieux ou, au contraire, si l’activité se dégrade.
Une autre nouveauté concerne les entreprises de moins de 50 salariés non couvertes par un accord collectif. Le texte se propose de permettre la conclusion de forfaits jours « individuels ». Ils devront respecter le plafond de 235 jours travaillés ( soit 14 jours de plus que la conversion des 35 heures en jours de travail).
Le projet de loi prévoit également que les indemnités prud’homales en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse varieraient selon l’ancienneté mais seraient plafonnées à 15 mois de salaire, soit la moitié environ du maximum actuellement versé.
Il est difficile de croire sérieusement qu’avec 6,5 millions d’inscrits à pôle emploi, allonger le temps de travail de ceux qui en ont déjà un pourrait faire reculer le chômage. Après 150 ans de lutte permanente de la gauche et du mouvement ouvrier pour que nous cessions de « perdre notre vie à la gagner », le gouvernement « socialiste » s’apprête, semble-t-il, à faire une croix sur ce combat et à considérer que le progrès social est définitivement terminé.