Ils viennent des Alpes du Sud, de la Savoie, de la Haute-Savoie, de l’Isère et du valais, ils ont entre 25 et 79 ans et sont une vingtaine à s’être levés aux aurores pour venir jusqu’au siège du CIO à Lausanne demander une deuxième fois[1] la caducité des Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de 2030 : Alpes 2030.

Parmi eux, un député, des élus régionaux et locaux, des collectifs citoyens et l’association Mountain Wilderness. La moitié a même fait le trajet Genève Lausanne à vélo, bravant le froid. La neige s’est invitée à moyenne altitude dans la nuit. Ils ont beau avoir annoncé leur visite quelques semaines auparavant et demandé à être reçus, ils ont trouvé porte close et ont dû rester à l’extérieur de cet immense bâtiment vitré pour remettre au directeur de la communication du CIO une lettre intitulée « on a perdu la flamme ». Flamme qu’ils ne sont pas prêts de retrouver… Librinfo74 a fait le voyage jusqu’à Lausanne.
Claquemuré dans ses locaux à Lausanne, le CIO semble avoir oublié les préceptes mêmes de l’olympisme ; l’ouverture, le fair-play, le respect.
Ce vendredi 24 octobre, à 14h, la surveillance est présente mais discrète autour du bâtiment du CIO, dont la porte est restée fermée aux élus, associations et citoyens venus de loin pour dénoncer le déni démocratique, la gabegie financière, l’aberration écologique de ces Jeux Olympiques d’hiver et prévenir le CIO des risques qu’il encourt en maintenant ces JOP d’hiver 2030 en France.
Parmi la vingtaine d’opposants aux JOP2030 à avoir fait le voyage jusqu’à Lausanne se trouvent le député de Savoie Jean-François Coulomme de La France Insoumise, les trois élus régionaux Les écologistes de la Région AURA, Pierre Janot, Fabienne Grébert (également élue à Annecy) et Claudie Léger (élue à Albertville), mais aussi le collectif citoyen JOP2030 emmené par la juriste Delphine Larat, le CAOJOP (comité d’alerte des JOP briançonnais) représenté par Stéphane Faure-Brac, NOJO Grenoble, le collectif Fier Aravis et enfin l’association Mountain Wilderness[2] venue en force avec son vice-président Francis Charpentier et une dizaine d’adhérents.
Élus et collectifs avaient demandé par mail à être reçus au CIO et s’étaient vus opposer un refus. Le CIO aurait-il du mal à digérer les différentes procédures juridiques notamment engagées par le collectif citoyen JOP2030, la Ligue des droits de l’homme, Mountain Wilderness d’un côté et les élus de l’autre pour faire valoir le droit à l’environnement et la consultation citoyenne tant que des alternatives sont possibles, y compris celle de ne pas organiser ces JOP ?
Ces procédures juridiques en cours, c’est en tout cas le motif que le CIO par l’intermédiaire de son directeur de la communication Michael Noyelle a invoqué pour ne pas recevoir la délégation dans ses bureaux, nonobstant les élus présents comme Fabienne Grébert et Claudie Léger qui ne se sont pas portés en justice et qui ont également réclamé une audience au CIO… et même si un recours n’empêche pas le dialogue.
Un CIO muré dans le silence
En se rendant sur place, ils espéraient pourtant que le CIO leur ouvre la porte. Ils restent incrédules devant cette porte fermée du grand bâtiment vitré en forme d’arc de cercle de l’association suisse à but non lucratif qui brasse des milliards. « Une porte résolument fermée avec tout un arsenal pour être sûr que nous ne rentrions pas », observe Delphine Larat.

Pierre Janot, conseiller régional Vert remet la lettre « On a perdu la flamme » au directeur de la communication du CIO
Déterminés, les élus et représentants des collectifs et association tentent malgré tout de faire entendre leurs arguments tour à tour à M. Noyelle durant quinze petites minutes, à l’extérieur, dans le froid. Les membres de la délégation, à laquelle John, un citoyen valaisans, est venu rejoindre, plaident, argumentent, alertent sur le contexte politique et financier explosif de la France, des risques encourus par le CIO et sur les catastrophes écologiques face à un Michael Noyelle impassible qui ne sort de son silence que pour répéter « je vous écoute. Je vous ai entendus ». Pourtant il n’a pris aucune note… « Et vous n’avez rien à nous dire ? » lui demande Fabienne Grébert. « Je n’ajouterai rien. » Dans une ultime tentative, un citoyen venu de Briançon lui lance: « Ça aurait été bien que vous nous accueilliez étant donné que vous nous imposez les JO. » Rien n’y fait !
Quand le conseiller régional Pierre Janot propose une photo de famille pour la remise de la lettre, Noyelle décline : « Vous m’épargnerez la photo, vous comprenez bien pourquoi. » Les opposants immortalisent malgré tout le moment en tenant haut un flambeau olympique sans flamme — « On pourra dire qu’il y a quand même quelqu’un au CIO qui nous a écoutés », ironise le député Coulomne.

Toute cette scène résume le fossé entre deux mondes : celui d’un comité international olympique opaque muré dans le silence qui méprise le peuple et ses représentants et celui de citoyens qui réclament simplement d’être entendus.
Mais les opposants continuent à mettre des cailloux dans les chaussures des porteurs des JOP2030.
Le 18 novembre, une audience devant le comité d’Aarhus à Genève marquera une étape cruciale : pour la première fois, une instance onusienne se penchera sur la légalité du processus olympique français.
Encore une « vélorution » en perspective ! A suivre…
Sandra Stavo-Debauge
[1] Cf. https://librinfo74.fr/une-delegation-opposee-aux-jeux-dhiver-2030-rallie-a-velo-le-siege-du-cio-a-lausanne-avant-la-date-fatidique-du-24-juillet/
[2] Mountain Wilderness France est la seule association environnementale de protection de la montagne à afficher son opposition aux JOP : « Pour nous les jeux ne sont pas faits. Nous ne sommes donc pas dans une logique d’atténuation de ses effets », nous a confié le vice-président.

