Le capitalisme n’est pas la solution au problème du capitalisme. Ou : à quoi va servir la COP21?
Le prochain sommet mondial de l’ONU sur le climat (COP21) devrait se tenir (malgré tout) à Paris du 30 novembre au 11 décembre 2015. Son objectif est la signature par 195 pays d’un accord international de réduction des gaz à effet de serre (GES) pour éviter la catastrophe annoncée en limitant le réchauffement climatique à moins de 2 °C.
Le réchauffement climatique trouve son origine au XVIIIe siècle, au moment de la grande transformation des sociétés occidentales, consécutive à l’usage sans limite des énergies fossiles au niveau de la production, des transport et de la consommation. Cette transformation s’est aujourd’hui mondialisée et a produit peu à peu une accumulation de gaz carbonique dans l’atmosphère dont nous mesurons aujourd’hui l’ampleur et la nocivité.
Depuis la première conférence internationale sur l’environnement, à Stockholm en 1972, la dégradation de l’environnement s’est poursuivie malgré la tenue d’autres conférences internationales dont celle de Rio en 1992 ou a été adopté le concept de développement durable et celle de Rio2 en 2012 ou le concepts de développement durable est remplacée par celui d‘économie verte. Ce remplacement traduit la volonté de donner une place prépondérante au secteur privé et de résoudre les problèmes du capitalisme par un développement du capitalisme lui-même.
Il faut savoir que depuis le début de l’ère industrielle la concentration de CO2 dans l’atmosphère a augmenté de 40 %. La concentration de méthane (CH4) de 150 % sous l’effet du nombre de ruminants, de l’expansion des rizières et des décharges. Le protoxyde d’azote (N2O), issus des activités agricoles (engrais) a cru de 20 %.
Les effets néfastes du réchauffement climatique sont multiples : sécheresses, inondations, hausse du niveau des mers (de 26 cm à 98 cm en moyenne ici à 2100) mettant en jeu la vie de populations vivant sur le littoral ou dans des îles, entraînant l’extinction de nombreuses espèces terrestres et marines incapables de s’adapter à des changements aussi rapides, acidification des océans, insécurité alimentaire, sévère pénurie d’eau sur plusieurs continents, impact sur la santé liée à l’insécurité alimentaire et à l’augmentation de maladies infectieuses…
Malgré la gravité de la situation à laquelle 80 % des habitants de la planète se disent très sensibles et malgré un grand rassemblement de citoyens concernés dans le collectif « Coalition Climat 21 », constitué de plus de 70 organisations, aucune solution politique ne semble devoir se dessiner.
Au niveau gouvernemental la situation inquiète, quand on entend François Hollande appeler à signer au plus vite le traité de libre-échange transatlantique (TAFTA) entre l’union européenne et les États-Unis, sans se préoccuper de l’incidence d’un tel traité sur le climat. On peut craindre, dans ces conditions, que la conférence de Paris ressemble à celle de Copenhague (COP 15) qui s’était conclue par un constat d’échec.
Quand on pense que les principaux sponsors de la COP 21 sont Engie, EDF, Total, SNCF, Carrefour, IKEA, Michelin, Véolia, Sanofi, Coca-Cola, L’Oréal, Suez environnement, que les agro-carburant seront présentés comme solution par le groupe Sofripotéol-Avril, présidé par le patron de la FNSEA, que Engie (exGDF-Suez) continue d’investir dans les centrales au charbon hors de France alors que celui-ci est le plus gros responsable des émissions de GES, quand on sait que les transports aériens et maritimes ne seront pas concernés par la discussion et que le mot « énergie fossile » ne figure pas dans le texte préparatoire on mesure à quel point cette conférence fera tout pour ne rien changer au système économique responsable de la catastrophe environnementale.
Pourtant un colloque des Nations-Unis qui se tenait à Cocoyoc, au Mexique, en 1974 remettait en cause le modèle économique dominant, abordait les questions de la pauvreté, des inégalités entre les pays, de la répartition des richesses, de la croissance, de l’économie de marché, du lien entre pauvreté et dégradation de l’environnement et de la gestion des biens communs. La radicalité du texte fut interprétée par les pays occidentaux comme une véritable provocation et les États-Unis, par l’intermédiaire de son secrétaire d’État Henri Kissinger, rejetèrent l’intégralité du texte. La déclaration de Cocoyoc conserve encore aujourd’hui toute son actualité. 40 ans après sa parution, on retrouve exactement les mêmes thèmes dans l’encyclique désormais célèbre du pape François « Laudato si. »
Résoudre la crise écologique et climatique appelle à rompre avec l’ordre économique mondial dominant que nous connaissons actuellement. Le modèle économique qui nous gouverne n’est pas en capacité de résoudre la question climatique. L’oligarchie financière et économique continue d’utiliser pour résoudre la crise écologique de fausses solutions au profit d’un « capitalisme vert » (marché carbone, mécanismes de compensation…).
L’indignation citoyenne ne suffira pas. L’intérêt général des peuples, dans le présent et pour le futur, n’est plus intégré dans le logiciel de décision de nos responsables politiques. Jean-Claude Juncker, président de la commission européenne, a dit : « il n’y a pas de choix démocratique par rapport aux traités européens » il n’y aura donc pas non plus de choix de survie pour l’humanité par rapport aux seul modèle économique imposé qui prétend être la solution au problème qu’il est lui-même.
Sources:
-GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat).
-Michel Marchand (in Res Publica. Nov.2015.)