EXPRESSION LIBRE : Questions à un candidat des primaires à droite
Nous publions, dans le cadre de notre rubrique « Expressions libres », un texte d’un de nos lecteurs qui a assisté à une réunion organisée par Bruno Lemaire, un des candidats de la primaire à droite.
Lettre adressée à Bruno Lemaire
Vous avez mentionné que vous vouliez des échanges avec la population. Des questions / réponses sont certes intéressantes, mais ne permettent pas un retour sur les sujets abordés. Pour cela je me permets d’apporter une suite à cette réunion.
Je vous ai posé la question suivante : Il serait intéressant de savoir ce que vous et votre parti mettez en priorité dans la vie : l’économie ou la vie ?
En effet, nous avons une économie mortifère qui génère des pollutions attentatoires à la santé : les aides vont principalement à l’agriculture intensive avec les pesticides et les plantes OGM. L’air, l’eau, les sols et la nourriture sont pollués ; les transports routiers polluent l’air – la vallée de l’Arve est une des régions les plus polluées de France ; recours excessif à la chimie dans tous les domaines avec entre autres les perturbateurs endocriniens ; soumission aux risques causés par nos centrales nucléaires vieillissantes comme si Tchernobyl et Fukushima n’avaient pas existé.
Vous avez indiqué que LR devraient s’occuper un peu plus d’écologie et ne devraient pas laisser le sujet aux seuls écologistes plus préoccupés à planter du cannabis sur leurs balcons.
Il est vrai que notre environnement nous concerne tous puisqu’il s’agit de notre vie et que cela devrait être la préoccupation de tous.
Pour l’agriculture vous considérez que les agriculteurs sont les meilleurs défenseurs de la nature.
Cette réponse est surprenante quand on sait les ravages que font peser les pesticides sur la santé des agriculteurs eux-mêmes, les dégâts à l’environnement et la santé de la population en général. Il ne s’agit pas ici d’incriminer les agriculteurs, mais les politiques françaises et européennes qui favorisent par leurs aides une agriculture productiviste et intensive, donc en fait une politique de soutien à l’industrie chimique. Nul doute qu’en contactant votre ancien collègue au Ministère de la Santé vous apprendriez ce que représente cette politique agricole en terme de coût pour la santé. En fait avec une agriculture productiviste, on ne comprend pas très bien le rôle du Ministère de la Santé dont les objectifs sont contrecarrés par son collègue de l’agriculture. Peut-être pourrez-vous corriger cette incohérence lorsque vous serez élu ?
Vous n’avez pas répondu à la question des OGM. Selon vous, sont-ils utiles ou doivent-ils être bannis ?
Vous reconnaissez que les transports routiers polluent et qu’il faut améliorer l’offre de transport.
Au-delà des déclarations il serait intéressant de savoir quelles mesures vous prendrez pour développer le transport ferroviaire et le cabotage maritime quand actuellement il y a un désengagement continu de la SNCF.
Recours excessif à la chimie dans tous les domaines avec entre autres les perturbateurs endocriniens.
Votre position à ce sujet serait utile.
Questions sur le nucléaire.
Vous reconnaissez que le nucléaire est cher et n’a pas d’avenir. Même si vous vous moquez des écologistes – qui ne font que planter du cannabis sur leurs balcons, vous commencez par ce biais à intégrer ce qu’ils disent depuis des dizaines d’années. Bientôt vous pourrez ajouter que le nucléaire n’offre pas d’indépendance puisque la matière première vient exclusivement de l’étranger, qu’il pollue en permanence avec les autorisations de rejet, donc pas propre, qu’il n’est pas sûr, car sujet aux risques d’inondation, de tremblements de terre, d’attaques terroristes et est même sujet à des erreurs humaines, comme dernièrement à Paluel. Suite à la tempête de 1999 nous aurions pu avoir notre Tchernobyl français au Blayais. Aurons-nous plus de chances une autre fois ou vaut-il mieux ne pas tenter le diable ? Est-il sensé de vouloir enfouir ses déchets, qui pour certains ont une durée de vie calculée en millions d’années, à 500 mètres sous terre et les laisser aux générations futures? Une galerie s’est déjà effondrée à Bure, les projets similaires en Allemagne et aux États-Unis sont un fiasco. Serions-nous meilleurs ?
Vous indiquez que vous vous baserez sur l’avis de l’ASN pour arrêter ou non les centrales vieillissantes. Tout le monde sait que les autorités de contrôle ne brillent pas par leur transparence et on a en mémoire le fait qu’elles ont été capables d’arrêter les nuages radioactifs à la frontière après Tchernobyl et que maintenant elles n’ont pas arrêté la construction de l’EPR à Flamanville malgré des malfaçons décelées dans la cuve du réacteur. Économiquement et humainement parlant le simple bon sens voudrait qu’on arrête les frais dès maintenant et ne pas attendre la catastrophe qui rayerait notre pays de la carte. Que pèse le bon sens en face des intérêts économiques de quelques grandes entreprises et des grands corps de l’État ?
On met en avant la dangerosité du monde pour avoir une défense nucléaire. Or, pour le nucléaire civil, il faut un monde en paix pour ne pas être la cible de terroristes. Là encore le bons sens voudrait qu’on ait l’un ou l’autre, et non les deux. Pour ne pas créer un désastre mondial il faudrait même arrêter les activités civiles ET militaires du nucléaire.
Je me permets de revenir sur certaines réponses que vous avez données.
Vous jugez la politique du gouvernement Hollande désastreuse et qu’il y a nécessité de changement. Beaucoup le pensent également. Le chômage augmente ainsi que les impôts et les déficits. Pourtant, quelle alternance ? Monsieur Hollande a été élu en 2012, car les français pensaient « que cela ne pouvait être pire que Sarkozy ». En outre, l’aventure libyenne a augmenté l’instabilité dans la région et a forcé notre pays à intervenir militairement dans plusieurs pays africains. Cela a participé à la crise du terrorisme que nous connaissons actuellement. Serions-nous l’arroseur arrosé grâce au prédécesseur de Monsieur Hollande?
De quelle manière pensez-vous faire la critique de cette période afin de comprendre qu’avec vous, ce serait différent ?
Vous mentionnez que les caisses sont vides, comme l’a dit Monsieur Fillon avant vous, et que les collectivités devront faire mieux avec moins.
On peut s’étonner d’entendre cet argument au moment où les Panama Papers révèlent qu’il y a des milliards d’euros et de dollars dans les paradis fiscaux et que très peu est fait depuis des années pour les récupérer, malgré les dénonciations de lanceurs d’alerte très peu soutenus. Cela met en évidence qu’il n’y a aucune volonté d’y remédier et que c’est même institutionnalisé en ayant mis à la tête de l’Europe un dirigeant à considérer comme délinquant ayant pendant trente ans organisé l’évasion fiscale dans son pays. Les banques peuvent toujours spéculer et il faudra attendre encore longtemps avant que la taxe Tobin ne soit appliquée.
Monsieur Lemaire, direz-vous qu’il n’est pas possible de toucher aux banques et aux paradis fiscaux qui protègent les multinationales et l’argent sale ? Qu’il n’y a pas d’autre solution que de prôner l’austérité puisque rien ne peut être fait contre la finance ?
Vous voulez dès votre élection instaurer un référendum pour réduire le nombre de députés et de sénateurs, réduire les mandats électifs en nombre et dans la durée.
C’est très positif. Pourtant une question de la salle faisait référence au système suisse de référendums et d’initiatives populaires initiés par le peuple. Si nous voulons un réel changement, la démocratie participative l’apporterait avec des élections à mi-mandat et destitution si les engagements pris ne sont pas tenus. Qu’en pensez-vous ?
Les questions posées n’ont pas permis d’aborder d’autres sujets importants comme le réchauffement climatique, les gaz de schiste et le TAFTA. Peut-être pourriez-vous vous positionner sur ces problèmes qui mobilisent la société civile ?
Je reviens à ma question de départ : quelle est votre priorité, l’économie ou la vie ?
En mettant la vie en premier, on règle une bonne partie des problèmes susmentionnés tout en permettant à l’économie de se développer harmonieusement. Cela ne semble possible qu’avec une remise en cause du système économique actuel basé sur la prédation et l’injustice. Le pourrez-vous ?
Bien cordialement.
Michel Rioche