Deux militants du PCF répondent à Raoul-Marc Jennar.
Suite à la parution dans librinfo74.fr du texte de Raoul-Marc Jennar intitulé : Le Front de gauche a-t-il un avenir ? , nous avons reçu un texte signé par Gilles Ravache et Annie Anselme en réponse à la mise en cause directe du PCF par Jennar. Compte tenu de cet élément, la rédaction de librinfo74.fr a décidé de faire paraître ce texte sur son site considérant que le droit de réponse se justifiait.
Le texte de Raoul-Marc Jennar s’adresse aux militants du PG et il leur appartient d’y répondre. Néanmoins réduire les difficultés du Front de Gauche à une seule de ses composantes, le PCF, ne nous paraît pas de nature à aider notre Front de Gauche à se redresser.
Permettez alors à deux militants de ce PCF d’essayer de faire partager leur raisonnement :
1) Sur les municipales : par exemple, près d’un million d’habitants d’Ile de France vivent dans une municipalité gérée par un conseil municipal dont la ou le Maire est communiste. Est-ce un atout pour la population ou non ? Plus de crèches, plus de transport gratuit, plus de logements sociaux, plus de culture partagée, etc. mais aussi une participation active des habitants aux décisions sont les caractéristiques de ce « communisme municipal » auquel le PCF est attaché. Nous qui habitons en Haute-Savoie, aimerions beaucoup pouvoir vivre dans de telles municipalités. Nous avons pensé, peut-être à tort, qu’il fallait continuer. Nous disons bien, nous, car contrairement à cette rengaine sur la différence entre la direction et ces militants de base « admirables », les décisions concernant les élections locales sont prises par les militants de chaque municipalité, le PCF est le seul parti français à fonctionner ainsi. Seules les candidatures proposées aux législatives ainsi que les têtes de liste dans les villes de plus de 20.000 habitants sont validées par le conseil national (toutes l’ont été en 2014). Différentes décisions en ont résulté, créant une impression d’illisibilité.
Nous pensons aussi, peut-être à tort, que l’alternative Front de Gauche ne sera crédible que si nous montrons notre aptitude à mener concrètement une autre politique ce qui peut se réaliser à l’échelon municipal, régional, … et si nous gagnons la Confiance de la population, si nous montrons notre capacité à créer des rassemblements, à ne pas exclure … Ce qui suppose aussi que les différentes composantes du Front de Gauche se montrent respectueuses les unes des autres.
2) Certains ont pensé que l’effondrement du parti socialiste, ouvrait mécaniquement un boulevard au Front de Gauche. Faux, construire une alternative au capitalisme suppose d’associer toute la population ce qui prend du temps. Or les tenants de l’ordre actuel empêchent tout débat de fond dans notre pays, nous devons donc les initier nous-mêmes, c’est d’ailleurs une des raisons de la réussite de la campagne électorale de Jean-Luc Mélenchon, cette éducation populaire qu’il avait réussi à faire partager, et la confiance qu’il avait su alors créer dans le PCF qui s’est mis en ordre de marche derrière lui, consciemment, base et sommet.
Depuis les années 90, notre pays vit avec le triomphe des forces du capital, la lutte des classes s’est exacerbée, le peuple français s’est dispersé. Notre pays a entamé une dérive vers un régime présidentiel fort. Il est urgent d’installer une sixième République, nous avons donc besoin, nous, de travail collectif, ce qui n’empêche pas l’expression de têtes dirigeantes respectueuses et enrichissantes. Si le capitalisme est compatible avec tout type de régime et s’accommode très bien des dictatures religieuses ou non, notre alternative sera nécessairement démocratique ou ne sera pas. Elle sera ouverte, collective, écologique et européenne. Elle associera la nation au sens souveraineté du peuple (et non pas nationaliste) et l’idée d’une Union Européenne démocratique et sociale.
Raoul-Marc Jennar a raison de dire qu’il faut travailler à proposer un autre développement économique, mais nous ne savons pas où il a vu ou lu que le PCF proposait un développement de type productiviste : venez nombreux à l’université d’été du PCF les 29, 30 et 31 août en Savoie aux Karellis vous débattrez avec un représentant du GIEC pour faire le point sur le réchauffement climatique, des paysans de la confédération paysanne ou du MODEF, des biologistes, des physiciens, des économistes atterrés ou non, des philosophes marxistes ou non, des écrivains…
3) Oui à la démarche unitaire européenne, c’est le dernier point que nous voulons développer et qui est de nature à donner une crédibilité forte de la démarche du Front de Gauche et là nous avons une divergence de fond avec le texte de Raoul-Marc Jennar. Nous ne sommes pas seuls en Europe dans l’Union Européenne ou hors Union Européenne et nous devons le faire savoir. Le Parti de la Gauche Européenne (PGE) réunit des partis de tout le continent : le plus emblématique est Syriza en Grèce avec Alexis Tsipras qui est aux portes du pouvoir (nous avons la responsabilité de l’aider) et partout les formations s’en réclamant font de meilleurs scores électoraux depuis quelques temps : en Espagne, au Portugal, en Slovénie, en Tchéquie, en Allemagne, … Le groupe de la Gauche Unitaire Européenne/Gauche Verte Nordique fait un travail remarquable au parlement européen, il est passé de 34 à 52 députés. En France, le Front de Gauche n’a pas utilisé suffisamment ce travail réalisé et malgré la stabilité de son score en pourcentage, n’a pas réussi la percée attendue (toute tête de liste confondue : PG, PCF, Ensemble)
A l’heure où des bruits de bottes résonnent partout dans le monde, les « prolétaires » de tous les pays doivent contribuer d’urgence à appuyer toutes les initiatives qui vont dans le sens de la paix.
Pour nous le Front de Gauche n’est pas mort et nous ne renoncerons pas. Nous préférons travailler tous ensemble à relever les défis posés.
Annie Anselme et Gilles Ravache