
Les habitants de Thônes sont inquiets pour l’avenir de leur espace naturel du lac de Thuy qui risque d’être défiguré par un projet d’aménagement initié par Pierre Bibollet, maire de Thônes.
Ce projet prévoit la création de deux STECAL(1) pour la réalisation de terrains de sports, la construction d’un vestiaire pour les activités de foot et rugby et l’activité de pêche.
Le Maire a ordonné l’ouverture d’une enquête publique sur le projet de mise en compatibilité (DPMEC) du P.L.U. de la commune de Thônes : https://www.mairie-thones.fr/fr/nw/2453219/2680641/avis-denquete-publique-plu-2
Cet avis d’enquête publique prendra fin le 9 janvier 2026. Vous pourrez donner votre avis au commissaire enquêteur sur l’adresse : enquete-publiqueDPMEC1@mairie-thones.fr.
Afin de bien comprendre les enjeux environnementaux de ce projet, le collectif « Fier-Aravis » a produit une étude approfondie du dossier dont vous trouverez les conclusions ci-dessous.
Il vous sera possible de rencontrer le maire pour qu’il puisse répondre aux critiques formulées par ce rapport :
Avis du Collectif Fier-Aravis – Aménagement lac de Thuy – 13 décembre 2025
Avis du Collectif Fier-Aravis relatif à la procédure de
« Déclaration de projet valant mise en compatibilité du PLU de Thônes » soumis à enquête publique
13 décembre 2025
INTRODUCTION
Par arrêté municipal 2022/139 en date du 10 mai 2022, Monsieur le Maire de la commune de Thônes avait ordonné l’ouverture d’une enquête publique relative au projet d’aménagement d’un espace de loisirs et sportif sur le secteur du lac de Thuy à Thônes. Cette enquête publique avait été abandonnée avant même d’avoir débutée.
Aujourd’hui, le projet revient sous la forme d’une procédure de « Déclaration de projet valant mise en compatibilité du PLU de Thônes » engagée lors du conseil municipal du 19 juin 2025.
Cette enquête publique porte sur :
– la création d’une OAP sectorielle, définissant les les principes d’aménagement du secteur du lac de Thuy,
– la création de deux STECAL (secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées) pour la réalisation de terrains de sport et la construction d’un vestiaire pour les activités de foot et rugby, ainsi que l’extension d’un local dédié à l’activité de pêche.
Rappelons qu’un STECAL est une dérogation pour construire dans une zone identifiée comme naturelle dans un plan local d’urbanisme (PLU).
Selon la fiche technique rédigée en octobre 2017 par le ministère du Logement et de l’Habitat Durable,
La finalité première d’une telle procédure, régie par l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme, est donc la mise en compatibilité simple et accélérée des documents d’urbanisme.
La notion d’intérêt général constitue une condition sine qua non de mise en œuvre de la procédure de mise en compatibilité du PLU par une déclaration de projet.
Source: https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/fiche_technique_- _declaration_de_projet_au_titre_du_code_de_l_urbanisme_maj2017_internet.pdf
Or, le dossier soumis à l’enquête publique se contente d’affirmer l’intérêt général du projet sans le justifier.
INCOMPATIBILITE AVEC LE SCOT EN VIGUEUR
Il convient de relever un fait notable mentionné dans la notice de présentation du projet : au titre de l’article 122-12 du Code de l’Urbanisme,
Les parties naturelles des rives des plans d’eau naturels ou artificiels d’une superficie inférieure à mille hectares sont protégées sur une distance de trois cents mètres à compter de la rive. Toutes constructions, installations et routes nouvelles ainsi que toutes extractions et tous affouillements y sont interdits.
Le projet soumis à l’enquête publique n’est pas compatible avec le SCOT Fier-Aravis en vigueur, à savoir celui de 2011, qui n’exclut pas le lac de Thuy du champ d’application de cadre législatif.
Cette enquête publique ne peut donc pas nous demander de modifier le PLU de Thônes pour le rendre incompatible avec le SCOT Fier-Aravis et donc contraire à la législation.
DE QUOI S’AGIT-IL ?
Le projet d’aménagement du lac de Thuy global s’étend sur 14ha est découpé en deux secteurs : – secteur Est : plaine des sports avec un terrain de foot et un terrain de rugby
– secteur Ouest : espace de loisirs du lac de Thuy
Le projet prétend développer « quantitativement » l’offre en matière d’équipements sportifs « à faible distance du centre-ville ». En pratique, il s’agit en fait de déplacer des équipements situés en centre-ville ou à proximité immédiate pour les déplacer en périphérie de la commune.
Le dossier ne dit rien de plus sur les équipements qui seraient déplacés et encore moins ce qui verrait le jour en lieu et place de ces équipements.
PRESENTATION BIAISEE
Le dossier et en particulier sa notice de présentation dresse un tableau biaisé et donc trompeur du projet:
1) en évoquant la présence de matériaux inertes en amont du lac de Thuy et en multipliant
les photos obsolètes d’un secteur aujourd’hui renaturé, une prairie sur laquelle pâturent des chevaux;
2) en indiquant une surface minorée de la STECAL n°9 (extension de la maison des Pêcheurs jusqu’au rives du lac), 100 m2 au lieu de 238 m2 selon les plans intégrés à l’évaluation environnementale
3) en délimitant une zone immense pour la STECAL n°10 (vestiaire et club-house) qui ne permet pas de localiser avec précision le projet de construction puisque la surface couvre près de 2 hectares… Pour un secteur de taille limitée, on fait mieux !
4) en affirmant dans la notice de présentation qu’aucune espèce protégée n’a été relevée sur le site du projet contrairement à ce qui est dit dans l’inventaire de l’évaluation environnementale
La présentation du projet est donc insincère et influence le jugement du lecteur donc du citoyen et des personnes publiques associées.
NUISANCES DISSIMULEES
La notice de présentation n’évoque pas les nuisances induite par le projet. Ces éléments sont pourtant majeurs pour décider de l’intérêt général d’un projet.
Pourtant, l’évaluation environnementale détaille la pollution lumineuse induite par l’éclairage à la fois des infrastructures sportives, des parkings et même des cheminements côté lac. Elle ne mentionne pas plus la pollution sonore induite par les activités sportives et extra-sportives mentionnées dans l’évaluation environnementale..
Ces nuisances ne touchent pas que la faune mais aussi tous les habitants du secteur car ceci représente une dégradation profonde de l’atmosphère paisible du hameau de Thuy.
Le dossier ne mentionne pas la présence de filets de protection indispensables entre les deux terrains et sans doute aux deux extrémités. Ces filets constitueraient des obstacles majeurs pour l’avifaune et un impact paysager notoire. La proximité de la RD909 pose également la question de filets de protection latéraux. La hauteur des clôtures de sécurité autour des terrains n’est pas plus mentionnée.
Par ailleurs, la notice de présentation n’évoque pas la pollution au plomb, relevée dans l’évaluation environnementale et dans l’avis de la MRAE, des terres où se situait l’ancienne décharge, juste en surplomb du lac de Thuy. Cette pollution présente un risque sanitaire majeur.
Le dossier indique qu’un diagnostic de la qualité environnementale des sols a été mené en 2022 et que ces derniers présentent des teneurs en plomb et en nickel supérieure aux teneurs limites de la norme NF U44-551.
Il est légitime de se demander quelles ont été les actions entreprises par la commune suite à la prise de connaissance des résultats de ces analyses. Est-il raisonable de vouloir non seulement développer mais même poursuivre une activité de pêche dans le lac de Thuy en connaissant cette menace ?
COMME UN CHEQUE EN BLANC
Cette modification du PLU paraît anodine. Elle ne l’est pas. C’est un pas en avant de plus des urbanistes pour nous mettre devant le fait accompli.
Vous allez entendre des arguments fallacieux du type « ce n’est pas parce qu’on positionne des STECAL que le projet va se faire » ou « rien n’est définitif ».
Plus tard, on vous dira qu’il est trop tard pour faire marche arrière, qu’« on ne peut plus reculer car tant d’argent a été investi ». Toujours la même recette.
On nous demande de modifier le PLU sur la base d’une déclaration d’intention. En gros, on va autoriser deux constructions sur ce secteur sans savoir exactement de quoi il s’agit, sans en avoir les plans, sans en connaître le coût ou les financements, sans en connaître les impacts indirects sur les zones « libérées ».
Autoriser ces STECAL, c’est donner le feu vert à ce projet mais aussi ouvrir la voie à d’autres projets dont nous ne soupçonnons même pas l’existence.
GOUFFRE FINANCIER
La notice explicative de la concertation publique ne mentionnait aucun coût. Néanmoins, en 2022, le maire de Thônes avançait un montant de 9 millions d’euros selon le procès verbal du conseil municipal du 14 avril 2022.
A l’heure de l’austérité et des coupes budgétaires, il semble impossible d’écarter cet enjeu financier et de ne pas en informer les citoyens lors de cette concertation.
Par ailleurs, quel serait le coût à la charge de la collectivité pour entretenir autant d’aménagements paysagers qui n’ont rien de vraiment naturel ?
Combien ont coûté le revêtement synthétique du stade de foot et la modernisation de l’éclairage ?
INTERET GENERAL ?
Est-il d’intérêt général de déplacer des équipements publics ?
Peut-on dépenser autant d’argent public pour n’apporter aucun service supplémentaire ?
On déplace la maison médicale à l’Ilot Rousseau.
On bouge la gendarmerie aux Perrasses.
On parler de déplacer la piscine et même la salle Coeur des Vallées. Là, on veut bouger les terrains de foot et de rugby.
L’urbaniste de Thônes joue au taquin avec les équipements publics, sans dévoiler les projets prévus à leur place.
L’urbaniste de Thônes n’aime pas le vide… Alors on peut supposer qu’il veut faire de la place pour de nouvelles constructions. Pour accueillir qui ? Accueillir des nouveaux travailleurs pendulaires qui viendront chercher des logements moins chers que sur le Bassin Annécien et engorger un peu plus la vallée ? Accueillir les habitants chassés des stations par la spéculation sur le foncier et les éloigner de leur lieu de travail ?
Au passage, on va aussi supprimer une zone de dépôt de remblai, la zone d’accueil des camping cars, une… Où tout cela va-t-il aller ?
Mentionnons également la zone de dépôt de grumes réduite à 200 m2 et surtout son emplacement prévu le long de la route au niveau de l’intersection entre la route de Thuy et de la route de Champriand. Est-ce bien raisonnable et fonctionnel ?
Eloigner les terrains du centre-ville et en particulier du Collège des Aravis ne fait qu’en compliquer l’accès. C’est autant de temps perdu pour les scolaires qui utiliseraient ces infrastructures.
D’ailleurs, aucun schéma ne mentionne de piste d’athlétisme autour d’un terrain… Une discipline qui fait pourtant partie des programmes scolaire. La différence de l’emprise est pourtant de taille ! La piste nécessite environ 50 m de plus en longueur et 20 m en largeur. Les deux terrains ne pourraient plus être l’un à côté de l’autre.
VOTE FAUSSE
Le vote du 19 juin 2025 en Conseil Municipal a été faussé par des affirmations non fondées. En effet, le club de Rugby ne soutient pas le projet contrairement à ce qui a été annoncé.
Le club demande juste un coup de bull pour mettre aux normes un terrain bosselé et en pente. A priori, bien moins coûteux que ce projet de relocalisation.
Il conviendrait par ailleurs de mettre dans le dossier des photographies réactualisées ne montrant pas la décharge de matériaux inertes qui n’existe plus. Sa présence peut influencer l’opinion des citoyens de Thônes et d’ailleurs qui ne connaissent pas le secteur.
IMPACT ENVIRONNEMENTAL
La notice explicative de la concertation affirmait : « Aucun habitat d’intérêt communautaire n’a été inventorié sur la zone d’étude. Aucune espèce d’intérêt patrimoniale ou protégée n’a été relevée. »
Néanmoins, nous avons pu étudier le dossier du projet soumis à la Commission Départementale de la Nature, des Paysages et des Sites (CNDPS) en septembre 2020 ainsi que l’avis de la Mission Régionale d’Autorité Environnementale (MRAE) du 24 mai 2022.
La MRAE avait alors analysé l’étude d’impact transmise dans le cadre de cette procédure :
« L’étude d’impact aborde les éléments requis par l’article R. 122-5 du code de l’environnement. Le caractère volumineux du dossier (840 pages) témoigne d’un travail approfondi et de qualité en particulier sur la thématique de la biodiversité et des milieux naturels. (…)
La présence de ce lac et d’un boisement relativement étendu à sa proximité orientale favorise une certaine diversité au plan des espèces. Le dossier recense près de 50 espèces protégées avérées sur le site de projet, principalement pour les groupes d’avifaune et de chiroptères : les boisements situés en secteur est comportant quelques arbres à gîte constituent un corridor de déplacement
d’importance pour les chauves-souris. Il n’y a pas d’espèce végétale protégée identifiée dans la zone de projet. Le niveau d’enjeu est estimé « fort » dans le dossier. »
L’inventaire environnemental présent dans le dossier confirme la présence avérée d’espèces protégées dans le périmètre du projet. Certaines espèces présentes sont même menacées.
Il est incompréhensible que la notice de présentation du projet puisse nier la présence d’espèces protégées.
Rappelons au passage que les aménagements touchent une importante zone de migration de batraciens. Tous les habitants de Thuy le savent. Ce point ne figure pas dans le dossier.
Quid des pollutions sonores et lumineuses dans un secteur où l’on observe des chamois dans les pâturages surplombant le lac ?
Le nouvel avis de la MRAE datant du 28 octobre 2025 mentionne également la destruction d’une zone humide de 1800m2, la réalisation de remblais en zone inondable et demande de préciser les incidences du projet d’aménagement vis-à-vis des déplacements et du dimensionnement des parkings.
CONCLUSION
Pour toutes ces raisons, nous estimons que l’intérêt général de ce projet n’est pas démontré.
Nous émettons donc un avis DEFAVORABLE pour cette déclaration de projet emportant mise en compatibilité du PLU.
De plus, nous demandons que des analyses toxicologiques des eaux et des boues au fond du lac de Thuy soient entreprises de toute urgence.


