À Rumilly, une famille kosovare, avec cinq enfants scolarisés, emmenée directement à l’aéroport de Lyon pour être expulsée

Ce jeudi matin, vers 7H00, des gendarmes de la cellule spéciale chargée des étrangers ont bloqué les portes de la résidence sociale de Rumilly gérée par l’ALAP. La Préfecture leur avait donné pour mission de repérer la famille Mehmeti avec ses 5 enfants mineurs, les emmener directement à l’aéroport de Lyon pour les expulser vers le Kosovo. Cette famille était sous la protection de l’équipe des travailleurs sociaux de la Fédération des Oeuvres Laïques (F.O.L) assurant un suivi d’intégration.

Les enfants de cette famille kosovare pensaient se lever comme d’habitude pour aller en classe. Sans trop comprendre ce qui se passait, ils se retrouvent dans des véhicules de la gendarmerie, puis dans l’avion.

Les deux jumelles, Blérona et Deilone, élèves de CM2, devaient prendre le chemin de l’école Joseph Béard. Le petit Erolind, qui aura 8 ans en mai, est dans une autre école. Petrit est scolarisé au collège du Clergeon à Rumilly.

Morentina est en seconde générale et technologique au Lycée Marlioz à Aix les Bains.

Une expulsion commando

La directrice de la résidence, Mme Montfort, arrive vers 8H30. On l’a prévient de l’intervention des gendarmes. « Au début, j’ai cru à une intervention concernant des délinquants. On m’annonce qu’il s’agit de la famille Mehmeti. Je ne comprends pas. Généralement, nous sommes prévenus par la F.O.L ».

Contacté au téléphone, Pierre-André Naton, Directeur de pôle social de la Fédération des œuvres laïques (F.O.L), déclare : « Cette famille était sous notre protection. Je ne comprends pas cette décision ».

Jointe au téléphone, la directrice de cabinet, Anne Coste de Champeyron justifie totalement le bien fondé juridique de cette reconduite à la frontière, bien qu’elle reconnaisse que l’expulsion d’enfants scolarisés soit « difficile humainement ».

Interrogée sur le nombre d’expulsions menées par la Préfecture de Haute-Savoie, la sous-préfète refuse de répondre prétextant que le gouvernement ne développe pas une politique « du chiffre ».

Une demande justifiée de réexamen de leur situation

Frappé le 4 juin 2012 par un arrêté d’expulsion (OQTF), la famille Mehmetti – par l’intermédiaire de son conseil, Maître Michèle Blanc – a interjeté appel du jugement du Tr!bunal administratif de Grenoble qui avait rejeté le 27 septembre tous les recours déposés par l’avocate.

La Cour administrative de Lyon n’a pas à ce jour statué.

Maître Michèle Blanc, qui a pris en charge le dossier de demande d’asile de cette famille, est révoltée par cette expulsion « sans ménagement » : « La famille Mehmeti est arrivée en France le 12 octobre 2009. Les parents, Selemi et Florijé ont suivi régulièrement les cours de français et leurs cinq enfants, Dorentina, Petrit, Blerona, Drilona et Erolind sont régulièrement scolarisés depuis 2009.  Le père a travaillé au groupement végétal de l’Albanais et bénéficie d’une promesse d’embauche de l’entreprise « Auto Service » comme mécanicien automobile. »

Le 22 janvier 2013, la Préfecture assigne à résidence Monsieur et Madame Mehmeti et leur notifie le 8 février de prendre l’avion pour le Kosovo au plus tard le 27 février.

Une interprétation différente de la circulaire du 28 novembre 2012.

Dans un courrier à la Préfecture daté du 11 février, Michèle Blanc, demande une régularisation de la situation administrative de cette famille avec la délivrance d’un titre de séjour sur la base de la circulaire du 28 novembre 2012 concernant la régularisation des sans-papiers, en arguant de son parfait parcours d’intégration, autant de la part des parents que des enfants.

La réponse de la Préfecture ne se fait pas attendre. Dans son courrier du 19, Chistophe Noêl du Payrat, maintient sa décision imposant le départ de la famille Mehmeti au plus tard le 25 février. Il considère que la circulaire  évoquée par l’avocate, pouvant justifier le maintien sur le territoire français de la famille : « exclut expressément de son bénéfice le réexamen de situations qui se traduirait, notamment, par le report systématique de l’exécution des mesures d’éloignement prononcées à l’encontre des intéressés. »

Dans sa réponse du 25, Michèle Blanc indique « qu’une lecture attentive du document ne m’a pas permis de retrouver une telle exclusion ». Selon elle, « la circulaire limite les clauses d’exclusion aux étrangers dont la présence en France constituerait une menace à l’ordre public ou qui se trouveraient en situation de polygamie sur le territoire national. » Des clauses qui ne concerneraient pas la famille Mehmeti.

Derrière la bataille juridique, la souffrance des enfants.

Comment évaluer la souffrance de ces enfants arrachés de leur classe, séparés de leurs copains, de leurs enseignants ?

Que se passe-t-il dans leurs têtes ?

Mme Coste de Champeyron a beau s’émouvoir de cette situation humainement difficile, le trio préfectoral défend une lecture de la circulaire du 28 novembre différente de celle de l’avocate.

Manuel Valls, peut-il trancher ?

Reste à savoir quelle est l’interprétation de Manuel Valls, Ministre de l’intérieur du gouvernement socialiste.

Une question que nous ne manquerons pas de poser.

 

 

Auteur: gfumex

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