JOP Alpes 2030 : un rapport confidentiel de l’Inspection générale des finances alerte sur un dérapage budgétaire

Les porteurs du projet de jeux d’hiver Alpes 2030 se gargarisaient « de jeux les moins chers de l’histoire[1] ». Ils avaient promis un budget « d’organisation » ou budget du Comité d’organisation (COJOP)[2] « maîtrisé » de 1,985 milliards d’euros au moment du dépôt de candidature. Le dossier était à peine validé qu’il était réévalué à 2,19 milliards d’euros. Après l’analyse du rapport de la mission d’appui à la consolidation budgétaire JOP 2030 (mars 2025) de l’Inspection générale des finances (IGF), il avoisinerait plutôt les 2,4 milliards d’euros pour le seul COJOP, et ce sans compter les dépenses d’infrastructures et la mobilisation des services de l’État. Or, après modélisation, le budget global de ses Jeux d’hiver pourrait dépasser les 5 milliards d’euros. La part d’argent public pourrait compter pour 60% de la facture totale. Du jamais vu…  Une perspective qui relance le débat sur l’opportunité et la soutenabilité des Jeux en pleine cure d’austérité budgétaire. 

Les Jeux Olympiques et paralympiques coûtent en moyenne deux fois le budget annoncé. Toujours lucratifs pour le CIO, l’histoire a montré que les Jeux d’hiver sont structurellement déficitaires pour les pays organisateurs. Imaginer que la France fasse exception relève de la pensée magique. Au regard du dernier rapport de l’IGF de mars 2025 que nous avons pu consulter, elle serait même médaillée olympique des financements publics. Largement minorés dans le dossier de candidature, ils se sont déjà envolés : ils ne seraient pas de 462 millions d’euros pour le COJOP comme annoncés (362 millions pour l’État et 100 millions pour les deux régions AURA et PACA -50 millions chacune), mais de 724 au minimum.

©Collectif Citoyen JOP2030

 

Un tour de passe-passe pour un budget insincère

Comme par magie, ou plutôt par un tour de passe-passe, les services de l’État mobilisables pour le bon déroulé des jeux (comme la sécurité) sont invisibles dans le budget. Or la somme est rondelette : pour Paris 2024, le budget de mobilisation des services de l’État a représenté 2,1 milliards d’euros d’argent public selon la note d’étape de la Cour des Comptes de juin 2025. A Paris, les sites des Jeux étaient relativement concentrés, pour Alpes 2030, ils vont s’étaler sur plus de 500 km, ce qui multipliera encore les coûts.

Pour présenter un budget non déficitaire et acceptable, des coûts ont été externalisés comme le terrassement et la production de neige de culture laissés à la charge des communes et des domaines skiables, le transport laissés à la charge des autorités compétentes sur la mobilité. L’externalisation des coûts de santé aura aussi un coût public élevé, coût qui n’apparaît pas non plus dans le budget du COJOP. Des magiciens, on vous dit !

Quant au budget de la SOLIDEO, société publique chargée de la construction des ouvrages olympiques, il a été évalué par l’IGF à 1 milliard d’euros minimum.

15 jours de compet’, 15 ans de dettes

S’il y a bien un héritage tangible et récurrent des Jeux, c’est l’endettement. Cet endettement, les communes qui devront assumer certaines infrastructures mettront des années à le payer. Et donc les citoyens qui, jusque-là, n’ont pas eu voix au chapitre. Sont-ils d’accord pour payer l’addition des dépenses publiques qui s’annoncent salées ?

Sans parler du réchauffement climatique et de la 6ème extinction de masse qui appelleraient à la sobriété, ne serait-ce pour que les générations futures puissent connaître la neige naturelle et les glaciers, cette candidature Alpes 2030 n’est-elle pas en total décalage dans le contexte budgétaire et financier de la France sommée par Bruxelles de réduire ses dépenses publiques ? Avec un Macron qui ne sert que les ultras-riches, ne cesse de rogner dans les services publics essentiels, taille dans les budgets du ministère du sport, de la jeunesse et de la vie associative et des collectivités territoriales, n’est-ce pas obscène de vouloir organiser ces jeux des sports d’hier coûte que coûte ? Avec la cure d’austérité imposée par Bruxelles, l’État pourra-t-il seulement honorer ses promesses ?

©Collectif Citoyen JOP2030

Examen du projet de loi olympique

« A l’heure où les député·es doivent examiner le projet de loi olympique dans le cadre d’une procédure accélérée, le contexte politique, financier, budgétaire et social est-il vraiment propice à aller dépenser 3,5 à 4 milliards € d’argent public pour des jeux olympiques d’hiver alors que la neige se fait de plus en plus rare ? », pointe le Collectif citoyen JOP2030 dans un communiqué.  A ce jour, alors qu’un grand nombre d’auditions ont déjà eu lieu à l’Assemblée Nationale, l’IGF, dont les différents rapports alertent des dérapages budgétaires, n’a pas été auditionnée, ni au Sénat, ni à l’Assemblée nationale pour le vote du projet de Loi olympique. Cherchez l’erreur…

Sandra Stavo-Debauge

* Rappel ci-dessous du débat de ce soir à Thônes 


[1] Faux, après analyse, ce sont les plus coûteux en argent public, 27% au lancement du projet…

[2] Le budget du COJOP est le seul à être présenté dans le dossier de candidature et le seul à faire l’objet d’une garantie de déficit par l’État (garantie non encore intégrée dans le budget de l’État, seules les deux premières garanties ont été intégrées au budget 2025 à hauteur respectivement de 500 millions pour la garantie de restitution des rétrocessions du CIO et 70 millions pour la garantie d’emprunt)

Auteur: librinfo74

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