Gaillard : Liana, 7 ans, gravement malade, est à la rue avec ses parents

Depuis ce mercredi 6 juillet, Liana et ses parents se retrouvent à la rue à Gaillard, sans aucune solution d’hébergement. Ce alors que la fillette de sept ans est non seulement scolarisée régulièrement depuis trois ans, mais souffre de plus d’une maladie rare nécessitant un strict suivi. Face au mur administratif, la mobilisation s’organise. 

D’après le site Infomigrants, la France a expulsé l’année dernière 13 400 « étrangers en situation irrégulière ». Au regard des 271 700 titres de séjour alors délivrés, cela peut paraître « raisonnable ». Mais derrière ces chiffres froids que l’on nous assène dans les médias, il y a des hommes, des femmes et des enfants de chair et d’os, avec des vies propres, des sentiments, chacun leur singularité.

C’est le cas de Liana.

Née en 2014, originaire du Kosovo, Liana Sulejmani est arrivée en France en janvier 2019 avec ses deux parents. La petite famille s’installe dans la commune de Gaillard, à la frontière suisse, et fait rapidement une demande d’asile. La première demande est rejetée en décembre 2020. Entretemps, Liana est scolarisée à l’école primaire du Châtelet à Gaillard et y apprend rapidement le Français.

Un nodule thyroïdien lui est diagnostiqué, une pathologie rare chez les enfants puisqu’il touche entre 0,2 et 1,4 % de la population de moins de 18 ans. Rare certes, mais à surveiller de près car le taux de cancer de la thyroïde parmi ces nodules est beaucoup plus élevé[1]. Les parents de Liana relancent alors la procédure d’asile pour raisons médicales, ayant réussi par ailleurs à obtenir de leur pays d’origine, le Kosovo, un certificat de l’hôpital de Pristina. Un document attestant de la difficulté de soins adaptés là-bas, renforçant la nécessité pour Liana de rester en France pour y être correctement soignée.

Tout bascule pour la petite famille début juin 2022

Ils se font expulser manu militari du logement qu’ils occupaient depuis 3 ans. Face à l’urgence de la situation, la famille Sulejmani est alors hébergée en urgence et de façon provisoire à l’hôtel Mercure d’Annemasse, la mairie de Gaillard en assumant les frais. Mais après 3 semaines, et alors que les vacances scolaires arrivent, la mairie refuse désormais de payer davantage.

Liana et ses parents, 6.07.22 ©Benjamin Joyeux

Face aux carences des autorités, la mobilisation s’organise

Ce mercredi 6 juillet, une quinzaine de personnes se rassemblent devant la mairie de Gaillard, en présence de Liana et de ses deux parents, afin de les soutenir et d’obtenir un rendez-vous avec l’équipe municipale.

Des institutrices de l’école de Liana sont notamment présentes et finissent par être reçues par Antoine Blouin, premier adjoint en charge des affaires scolaires. Ce dernier indique qu’à ce jour, la mairie n’a plus aucune solution d’hébergement à proposer et refuse de payer davantage. Après une petite heure de discussion, la délégation ressort sans aucune autre solution à proposer à la famille que de tous se cotiser pour pouvoir continuer à payer l’hôtel, les Sulejmani ayant rendez-vous ce 7 juillet au matin à la Maison de la Justice et du droit de Gaillard, dans l’espoir de se voir enfin proposer une solution.

Pour participer à la cagnotte pour Liana

Car tout ce que les autorités proposent, c’est d’appeler le 115, totalement saturé.

Mobilisation devant la mairie, 6.07.22 © Benjamin Joyeux

Le droit de travers

Rappelons qu’en vertu de la Convention des Nations unies sur les droits de l’enfant[2], ratifiée par la France depuis 1990, tous les enfants résidant sur le territoire français doivent bénéficier de la même protection, quelle que soit leur situation administrative, et notamment du droit de disposer d’un hébergement et de ne pas avoir à dormir dehors. Sans parler du droit d’être soigné. Si Liana était une mineure isolée, elle relèverait de l’aide sociale à l’enfance du département de Haute-Savoie.

En attendant, ni monsieur ni madame Sulejmani ne peuvent travailler malgré leur bonne volonté, étant dans l’attente d’une décision quant à leur statut administratif. La petite Liana, elle, effectue sa dernière journée d’école de l’année après trois semaines d’hôtel et désormais dehors, toujours malade et le crâne dégarni, son traitement contre le nodule lui ayant fait perdre tous ses cheveux. La famille doit survivre à trois avec 120 euros de bons alimentaires gracieusement accordés pour trois semaines par notre si généreux pays, à quelques centaines de mètres de la frontière suisse et de Genève, une des villes les plus riches du monde.

Pas sûr que le sommeil de Liana soit léger ce soir.

En France, 7e pays le plus riche du monde, plus de 50 000 enfants vivent actuellement en hébergement d’urgence, dans des abris de fortune ou à la rue.

Parmi eux désormais, la petite Liana.

Benjamin Joyeux

[1] Voir notamment https://www.em-consulte.com/article/1078521/nodule-thyroidien-de-l-enfant-et-de-l-adolescent

[2] Lire https://www.ohchr.org/en/instruments-mechanisms/instruments/convention-rights-child

Auteur: librinfo74

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