LIBRE EXPRESSION ……………… Des « jeux de cons » à la dévalorisation sociale de tous, jeunes et policiers

Marc Pascal est un  habitant du quartier des Hauts de Chambéry.

Nous vous livrons son analyse sur les confrontations entre les jeunes du quartier et la police, confrontations qui ont donné lieu à une énorme couverture médiatique nationale.

4 novembre 2016

Socio économiste, je souhaite vous donner mon analyse de ce qui s’est passé ces derniers jours et de la manière dont les événements ont été relatés par les médias.

Je ne tolère pas les « Jeux de cons » qui s’accumulent. Je vous prie de bien vouloir excuser mon vocabulaire cru mais il est des jours où il vaut mieux ne pas se taire.

J’ai éteint un feu de poubelle le 31 dans ma rue. A ma grande surprise, des policiers sont arrivés après moultes manoeuvres en bout de rue, flash ball à la main…. (moi j’avais mon seau…!)

C’est clair que les jeunes ont eu, ces soirs du 31 Octobre puis du 1er Novembre,  des « jeux de cons » en lançant un jeu du chat et de la souris avec la police dans le quartier. Je ne vais pas les défendre. (Mais je dois vous dire avoir inviter les mêmes à participer aux activités du jardin partagé une quinzaine de jours avant, ce qui a été l’occasion de contacts conviviaux, ce ne sont pas des monstres).

J’ai la forte impression que, ces 2 soirs, la police aurait pu faire preuve de plus de malice et de professionnalisme en évitant de rentrer dans leur jeu tordu.

Le 2 au soir encore, une dizaine de policiers de la BAC, en civil, trônaient en haut de la rue d’Annecy « contrôlant » le territoire face au Super U tels les vainqueurs d’une guerre urbaine prêts à bondir sur tout ce qui bouge, sur tout flammèche de jeune qui aurait remontrer le bout de son nez. C’est l’effet que cela a produit sur moi lorsque je suis passé prés d’eux, par deux fois. Ce nombre de policiers correspond  probablement à une grande part des effectifs mobilisables dans une soirée sur l’aire chambérienne. Juste pour faire comprendre  aux jeunes qu’ils sont matés, point barre.

 

Serait-ce, de la part de la police, un autre jeu de con…? si tel est le cas, c’est très grave.


On peut même craindre que cette forme de réponse policière soit (volontairement ou non ?) de la provocation …tant les titres à la une du Dauphiné Libéré et sur FR3 servent évidemment le discours et la posture des policiers en manifestation extra syndicale le même jour, 3 nov, au soir… une coïncidence trop surprenante pour ne pas susciter des investigations et un effort pour comprendre. Quel média a fait cet effort ?

Et quand bien même nous pouvons considérer que des feux de poubelles et d’une voiture sont des violences urbaines, le bilan final (quelques poubelles et 1 voiture brûlées pour atteindre une caméra de surveillance…) ne valait pas la couverture médiatique qui fut déclenchée. Bien plus importante que celle que les médias réservent aux délits des cols blancs, aux trafics humains, aux délits des entreprises face au Code du Travail, à la violence du non respect de la loi par une partie du personnel politique et des responsables économiques…etc… par ailleurs. Deux poids, deux mesures. Les médias jouent donc aussi un jeu de con… dans un climat de campagne présidentielle qui est un autre jeu de cons….

 

Ça fait beaucoup mais ce n’est pas tout.

 

Reste à évoquer (convoquer?) les absents: une animation jeune du quartier inexistante (en tout cas très inférieure aux besoins), des structures sociales délitées et fragiles (le collège, l’école, les centres sociaux inadaptés à ce que nous avons fait de la jeunesse….), les éducateurs de rue et leurs employeurs (ville, agglo, conseil départemental, Etat) loin des réalités de terrain pour ne pas dire que certains sont quasiment déserteurs…. La politique de la ville est-elle aussi un jeu de con qui ne dit pas son nom?

Le jeu des jeunes, idiot je  le répète et je ne veux pas les excuser, est juste la rançon de nos abandons depuis plusieurs décennies, agglo de gauche comme de droite réunies. Qu’ils se rebiffent contre les caméras de surveillance est logique dans le monde qu’on leur fabrique. Et dire que leur motivation est de protéger leur commerce illégal est honteux de la part des policiers et des médias. C’est juste une manipulation de l’information tant on sait  que ce commerce se déplace bien plus vite que ne s’installent les caméras!. Et, au fait, qui sont les clients -dont nous ne parlons jamais- qui tire les ficelles de ce commerce?…  et pourquoi n’arrivons nous pas à proposer d’autres activités aux jeunes??

 

Toute la communication de ces 3 derniers jours pourrait bien être cousue de fil blanc: l’instrumentalisation des « événements urbains » des 31 oct et 1er nov par les policiers et les médias ne serait, alors, pas acceptable voire criminelle en rajoutant de l’huile sur le feu (ou plutôt sur le jeu…)

 

En réponse à ces événements, nous devons impérativement réagir et proposer des actions assez simples à mettre en oeuvre si la volonté existe:

 

  • Nous devons mettre en place une véritable politique jeunesse (tout âge) sur le quartier  en faisant évoluer radicalement le rôle, les moyens, les activités des structures du quartier. En étroite collaboration avec leurs familles et toutes les structures d’intervention sociale dont les missions doivent être revues et corrigées.

 

  • Dans le cadre de la protection de l’enfance et de l’animation sociale et culturelle, une équipe d’éducateurs formés et expérimentés doit intervenir sur le long terme auprès des 10-25 ans de manière pérenne, constante, professionnelle, pro-active et pas seulement en curatif, en ciblant les groupes pouvant ponctuellement poser problème.

 

  • La politique de la ville doit redonner aux parents et aux jeunes du pouvoir d’agir, des emplois, un goût pour le vivre ensemble… au delà de son contenu actuel trop peu ambitieux en la matière. C’est sur le vivre ensemble qu’il faut mettre les moyens plutôt que sur certains éléments de rénovation urbaine moins utiles.

 

  • Nous devons rétablir des liens positifs entre la police, les habitants et les jeunes (en reprenant le concept de la police de proximité qui a eu des effets positifs, jouant un triple rôle de prévention, d’éducation et de coercition. Le succès des Correspondants de nuit le confirme également, qu’il faut amplifier et étendre le jour en redonnant cette mission à des services régaliens et non associatifs)

 

  • Nous devons exiger un traitement des événements sociaux par les médias et les journalistes, qui soit digne, professionnel respectant la déontologie du journalisme. Nous devons également demander à ces médias de jouer pleinement leur rôle d’information-éducation en parlant des initiatives positives, en contribuant à remobiliser les habitants autour des valeurs de liberté, égalité, fraternité…plutôt que de promouvoir la désinformation et la dévalorisation des catégories sociales défavorisées.

 

Arrêtons de tirer vers le bas. Tirons ensemble vers le haut (…et sans flash bal, s’il vous plait!).  Les résultats seront très rapides.

Auteur: j.c

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