Contre pouvoirs : un film de Malik Bensmaïl sur l’indépendance de la presse en Algérie. À voir sans faute
Invité par Plan large dans le cadre du festival « Clap Maghreb », Malek Bensmaïl était à la Turbine ce samedi 30 janvier pour la projection de son film « Contre-Pouvoirs ».
Nous avons interviewé ce cinéaste franco-algérien pour qu’il nous parle de ses motivations qui l’ont amené à nous raconter EL WATAN, à travers la vie de sa rédaction, mais aussi à vouloir rendre hommage à son directeur, Omar Belhouchet qui, face au pouvoir politique d’État, au pouvoir économique et à celui du fondamentalisme religieux, a réussi, avec toute son équipe, à imposer l’indépendance d’EL WATAN.
Dans son film, Malek Bensmaïl a tenu à dépeindre Omar Belhouchet comme un « anti-héros » en opposition aux « héros de la révolution » glorifiés par le pouvoir du FLN.
L’Enregistrement téléphonique n’étant pas toujours d’excellent qualité, vous trouverez son interview retranscrite sous la vidéo
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El Watan est l’émanation de 16 journalistes d' »El moudjahidin d’Alger » qui était l’organe du parti unique FLN depuis la guerre de libération. À partir de là, il s’agit de faire une ouverture démocratique (Loi Hamrouche) (ndlr) avec la possibilité d’ouvrir des canards indépendants.
Ces journalistes qui ont créé (le quotidien francophone) EL WATAN (en 1990) sont tous devenus actionnaires d’une coopérative.
Omar BELHOUCHET* fait partie de ces 16 actionnaires.
Omar BELHOUCHET est un journaliste qui a un parcours d’économiste Il est devenu directeur de la publication d’EL WATAN, et depuis 25 ans, il accompagne. C’est quelqu’un qui a vécu tous les chamboulements de la société algérienne. Il a aussi bien sorti tous les dossiers contre le fondamentalisme que sur le régime autoritaire.
C’est quelqu’un qui a subi des attentats.
Le journal a été arrêté 6 fois, 6 interruptions par le pouvoir.
Il fallait réfléchir à une indépendance totale. Le journal était imprimé par l’imprimerie nationale, d’où les interruptions par l’État.
Omar BELHOUCHET est allé voir les patrons d’EL KHABAR, l’autre quotidien arabophone. Il leur a dit : « pour être indépendant, il faut qu’on ait une imprimerie privée, il faut qu’on investisse dans les machines et qu’on fasse notre propre journal de bout en bout pour garder le cap ». Je le trouve assez fort sur ces questions là.
Quand ils ont pu construire cette imprimerie, ils ont eu l’idée intéressante de sous-louer cette imprimerie à des petits journaux qui ne peuvent pas se payer des imprimeries nationales.
Il y a eu des pressions de l’état, du gouvernement, auprès des annonceurs pour qu’ils ne passent plus de publicité au sein d’EL WATAN, ceci pour l’étouffer.
Il a perdu 50 à 60 % de gains publicitaires.
Quand il (Omar BELHOUCHET) recrute de jeunes journalistes, pour les former à la langue française, il les envoie se perfectionner soit à l’école de Paris ou de Lille, les deux grandes écoles de journalistes.
Il veut un journal de qualité et développe beaucoup en ce moment la partie internet d’EL WATAN, dont l’accès est gratuit. Il le fait exprès pour ceux en Algérie qui ne peuvent pas acheter le journal dont le prix représente celui de deux baguettes de pain.
Il trouve toujours des systèmes économiques, soit pour la formation des journalistes, soit pour que tous puissent accéder à une information de qualité
SYNOPSIS
« Après vingt années d’existence et de combats pour la presse indépendante algérienne, Malek Bensmaïl pose sa caméra au sein de la rédaction du célèbre quotidien El Watan, nécessaire contre-pouvoir à une démocratie vacillante, à l’heure où Bouteflika s’apprête à briguer un quatrième mandat. Une rencontre avec celles et ceux qui font le journal, leurs doutes, leurs contradictions, leur souci permanent de faire, chaque jour, un journal libre et indépendant ».
Une réflexion sur le travail et la pensée journalistique.
Un film universel qui réunit tous les journalistes de tous les pays, qui veulent travailler librement dans les médias qui devraient tous se considérer comme des contre-pouvoirs.
Malek Bismaïl sera le vendredi 19 février 2016 à 21H00 au cinéma l’Astrée à Chambéry pour débattre avec le public après la projection de son film
*Omar Belhouchet a été emprisonné en 1993 et a subi un véritable harcèlement judiciaire (près de 230 procès en diffamation). Il a échappé à deux attentats. Omar Belhouchet a obtenu plusieurs prix internationaux. Il a reçu la plume d’or de la liberté en 1994, récompense qui salue les combats pour la liberté de la presse dans des conditions difficiles.