Épouvantails d’hier et d’aujourd’hui.
L’effondrement du bloc soviétique marque, selon certains, la « fin de l’histoire » (Fukuyama. Chicago 1989). Cela signifie, selon eux, que l’humanité a progressé laborieusement depuis la préhistoire vers cette nouvelle ère où le progrès n’a plus de sens puisqu’il a atteint son but : la libération totale du marché et son monopole mondial.
En tout cas, c’est ce que pensent les tenants du néolibéralisme triomphant, les économistes disciples de Friedman , les gros propriétaires et les gouvernements du monde impérialiste.
On se rend compte alors que, depuis le plan Marshall, ce qu’on appelle, en Europe, les 30 glorieuses, pendant lesquelles les peuples ont bénéficié d’une amélioration de leur niveau de vie, n’avaient pour but que de détourner la population de la tentation communiste.
On s’en rend compte parce que, comme l’histoire, c’est fini.
La sécurité sociale, les services publics de santé, les puissants syndicats pour la protection des travailleurs, toutes ces institutions concédées par les plus puissants aux plus fragiles n’ont plus lieu d’être. Elles n’étaient que des éléments de concurrence avec le monde soviétique.
Maintenant qu‘ »il n’y a plus d’alternative » (Margareth Thatcher), il n’y a plus, non plus, de scrupules à avoir : que les meilleurs s’enrichissent et que les autres, bien conditionnés par les médias, bien dévalorisés par le chômage, se taisent, s’écrasent.
Mais ils ne s’écrasent pas assez, pas partout.
Au Chili, il faut que la CIA installe un Pinochet et ses sbires pour noyer dans le sang les exigences démocratiques.
En Argentine, la répression cruelle remet à leur place les dissidents du marché libre.
En Pologne, Solidarnosc est privé de sa victoire par l’impérialisme économique.
Même chose en Afrique du Sud où Nelson Mandela, vainqueur politique, est neutralisé par la puissance financière des anciens protagonistes de l’apartheid, où le peuple noir reste dans la misère.
Malheur à qui tente de s’opposer au paradis totalitaire de la finance !
Alexis Tsipras et les Grecs en savent quelque chose.
Et nous aussi.
Nos pays (occidentaux) sont les berceaux de tous les colonialismes et de l’impérialisme et nos traditions « démocratiques », « républicaines », « révolutionnaires », nous ont préservés, jusqu’à présent, des coups d’Etat et des répressions sanglantes.
Alors, il nous faut, pour rentrer dans le rang et faire taire toute velléité d’égalité et de justice, un nouvel épouvantail qui, par sa cruauté et son fanatisme aveugle, nous terrorise.
Et Daesh, sur ce plan, est plus efficace que ne l’avaient été le communisme et l’Union Soviétique.
Maintenant, ainsi parlent nos maîtres :
« vous vouliez une alternative, vous l’avez. Choisissez votre camp.
Nous sommes en guerre attention aux traîtres ! On ne plaisante plus.
Vous avez vu comme ils sont méchants ?Mais ne craignez pas au-delà du nécessaire nous vous protégeons. Vous n’avez plus besoin de liberté mais de sécurité.
On n’est pas bien, entre nous, dans le monde capitaliste ? »
Mais plutôt que de faire la guerre à l’État islamique, ne pourrait-on pas leur couper les vivres ? On pourrait en tout cas le demander à nos amis du golfe.
Nous pourrions ainsi traiter, entre nous, nos problèmes d’accaparement éhonté des richesses, de destruction catastrophique de l’environnement et, finalement, peut-être imaginer une vraie démocratie.
Quoi qu’en dise l’oligarchie au pouvoir, l’histoire n’est pas finie, nous avons encore, entre nous, quelques comptes à régler.