70 ans, déjà. Bon Anniversaire, la Sécu !
Extraits de l’ordonnance du 4 Octobre 1945:
« La sécurité sociale est la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes.
Trouvant sa justification dans un souci élémentaire de justice sociale, elle répond à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain, de cette incertitude constante qui crée chez eux un sentiment d’infériorité et qui est la base réelle et profonde de la distinction des classes entre les possédants sûrs d’eux-mêmes et de leur avenir et les travailleurs sur qui pèse, à tout moment, la menace de la misère.
Envisagée sous cet angle, la sécurité sociale appelle l’aménagement d’une vaste organisation nationale d’entraide obligatoire qui ne peut atteindre sa pleine efficacité que si elle présente un caractère de très grande généralité à la fois quant aux personnes qu’elle englobe et quant aux risques qu’elle couvre.
Le but final à atteindre est la réalisation d’un plan qui couvre l’ensemble de la population du pays contre l’ensemble des facteurs d’insécurité. »
70 ans après cette déclaration, la Sécurité Sociale, qui est passée par toutes les phases de la vie, un temps de formation et quelques décennies de pleine maturité, présente des signes de faiblesse inquiétants.
Mais si on y regarde de plus près, on s’aperçoit qu’il ne s’agit pas d’un phénomène naturel de vieillissement qui l’atteint mais un comportement de maltraitance volontaire de la part du pouvoir politique.
C’est le but même et donc le sens de cette organisation humaine qui est remis en cause.
Qui veut aujourd’hui » débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain » et du « sentiment d’infériorité qui est la base réelle et profonde de la distinction des classes entre les possédants sûrs d’eux-mêmes et de leur avenir et les travailleurs sur qui pèse à tout moment la menace de la misère » ?
Certainement pas nos dirigeants politiques qu’ils soient français ou européens qui ont reçu des « possédants sûrs d’eux-mêmes » l’ordre de leur fournir des travailleurs soumis, corvéables et jetables.
Aujourd’hui, qui n’a pas les moyens de se payer une assurance complémentaire suffisante, n’aura pas davantage les moyens de se faire soigner ou de faire soigner sa famille.
Aujourd’hui celui qui perd son travail non seulement n’est pas sûr d’en trouver un autre mais sait pertinemment qu’il devra certainement accepter un salaire inférieur pour être réembauché.
L’insécurité et le chômage ne sont pas des accidents mais des instruments de domination par la crainte et l’angoisse. La menace de la misère est brandie comme une incitation à travailler plus et à gagner moins pour conserver un emploi que les propriétaires peuvent aller proposer à tout moment à des travailleurs encore plus misérables.
Depuis 1945, la richesse a plus que doublé en France et en Europe. Le problème n’est pas là. Ce n’est pas l’argent qui manque. Ou plutôt il ne manque pas à tout le monde.
Non, c’est la volonté politique qui a changé. Les belles idées du Comité National de la Résistance qui avaient forcé les riches, après la guerre, à faire semblant d’être des citoyens solidaires, ont été bafouées par cette même classe des possédants avides, refusant de payer l’impôt, convaincus de leur supériorité.
Aujourd’hui, en France et dans le monde, la classe des possédants est redevenues la classe des dominants, la classe des travailleurs a repris sa place inférieure. Il ne lui reste plus qu’à retrouver sa capacité de résistance et de révolte si elle veut encore avoir devant elle des « jours heureux » (*)
(*) Le Programme du Conseil national de la Résistance souvent abrégé en Programme du CNR, et intitulé dans sa première édition « Les Jours Heureux par le C.N.R. », est un texte adopté à l’unanimité par le Conseil national de la Résistance français le 15 mars 1944. (Wikipédia)
« Les jours heureux » est également le titre d’un film de Gilles Perret sorti en Novembre 2013 et inspiré du texte cité ci-dessus.